Bulletin célinien, n°412
Sommaire :
Pierre Laval vu par Céline
Un guide du Paris “réac et facho”
Sillonner les transports céliniens à la recherche du style
Voyage à nouveau sur les planches
Céline au bout de la nuit africaine
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Bulletin célinien, n°412
Sommaire :
Pierre Laval vu par Céline
Un guide du Paris “réac et facho”
Sillonner les transports céliniens à la recherche du style
Voyage à nouveau sur les planches
Céline au bout de la nuit africaine
par Marc Laudelout
Contre Céline tout est désormais permis. Dans un fort volume d’un millier de pages, on peut, sans susciter guère de contestations, le faire passer pour un vil délateur et un actif agent de l’Allemagne alors même qu’on n’apporte aucune preuve tangible. Tout ou presque n’y est que suppositions gratuites, insinuations malveillantes, déductions fallacieuses et hypothèses bancales. Le piège est redoutable car réfuter ces calomnies vous fait ipso facto passer pour un personnage suspect. Céline, il est vrai, n’est pas un écrivain facile à défendre tant il s’est mis lui-même dans un mauvais cas. Il ne s’agit d’ailleurs pas de le défendre (son procès se tint il y a plus d’un demi-siècle) mais d’établir les faits, uniquement les faits. On aurait envie de répondre à ses détracteurs que ce n’est pas la peine d’en rajouter même si l’envie démange certains de le mettre indéfiniment en accusation. Ils n’ont de cesse de faire encore et toujours son procès. L’année du cinquantenaire de sa mort, la chaîne franco-allemande Arte, puis la Télévision suisse romande, ont précisément diffusé un documentaire refaisant Le Procès de Céline, où intervenait déjà le tandem Taguieff-Duraffour. Aujourd’hui, la revue L’Histoire publie un dossier sur le même sujet ¹ et, au début de ce mois, le tribunal de la FFDE (Fédération Française de Débat et d’Éloquence) organise au Palais de Justice de Paris un nouveau “procès Céline” !C’est dire si le livre de David Alliot et Éric Mazet vient à point nommé pour remettre les pendules à l’heure. Le lecteur y verra que ni le docteur Joseph Hogarth (Bezons) ni le docteur Herminée Howyan (Clichy) ne furent victimes des propos de leur confrère Destouches. Et, comme l’a admis l’Association des Amis de Robert Desnos, Céline n’est strictement pour rien dans le sort tragique du poète. Les auteurs démontent aussi l’assertion venimeuse selon laquelle Helmut Knochen aurait désigné Céline comme agent du SD. C’est de la même farine que la mention de son nom sur une note d’Otto Abetz le pressentant pour diriger le Commissariat général aux questions juives. Le premier biographe de Céline évoquait déjà un « document sans aucune valeur de preuve » (Gibault III, p. 257). Tout le problème réside là, en effet : n’ayant ni l’un ni l’autre de formation historique, Taguieff et Duraffour ne procèdent à aucune critique interne et externe des documents qu’ils exhument. À partir de là, c’est la porte ouverte à toutes les allégations, surtout si elles vont dans leur sens.Le plus grotesque dans la démarche de Taguieff est sans doute ailleurs : dénier à Céline toute réelle valeur littéraire. « Son pavé est conçu comme une entreprise de démolition de l’écrivain. L’intention est bien d’écarter de Céline tout lecteur, tout directeur de thèse, tout acteur, comme autrefois les catholiques jetaient l’opprobre sur Voltaire, les républicains sur Chateaubriand, les féministes sur Sade et les sacristains sur Baudelaire. »
Gageons que la grande presse ne parlera guère de cet opuscule incisif et pugnace. Ce serait mettre en question les articles convenus qui rendirent compte du bouquin de Taguieff. Les céliniens, eux, savent ce qu’il leur reste à faire : lire et faire connaître autour d’eux cet ouvrage qui y répond de si magistrale façon.
• David ALLIOT & Éric MAZET, Avez-vous lu Céline ?, Pierre-Guillaume de Roux, 2018, 128 p. Diffusé par le BC (20 €, port inclus).
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Bulletin célinien n°411
octobre 2018
Sommaire :
- Céline en Italie:
Rencontre avec Valeria Ferretti
- Une « dénonciation oubliée »
- Actualité célinienne
- « Céline & Céline » de Michel Ruffin.
par Marc Laudelout
Jean-Luc Barré, qui dirige depuis une dizaine d’années la collection « Bouquins » chez Robert Laffont, accomplit une partie de la mission que n’assure plus Antoine Gallimard pour la « Bibliothèque de la Pléiade ». Celle-ci se targue d’être « un héritage augmenté des chefs-d’œuvre de notre temps ». Pour des raisons de toute évidence idéologiques, la maison Gallimard refuse une part de cet héritage. Ni Barrès, ni Bainville, ni Maurras n’y ont droit de cité. Tous trois réédités, en revanche, dans la collection « Bouquins ». On peut naturellement penser ce que l’on veut du maître de Martigues mais nier qu’il ait exercé, pendant près d’un demi-siècle, un magistère intellectuel sur ses contemporains serait grotesque. Dans un fort volume de plus d’un millier de pages, les éditions Robert Laffont rééditent donc ses grands textes, de L’Avenir de l’intelligence à Kiel et Tanger sans oublier ceux sur l’esthétique ainsi que sa poésie dont de superbes textes érotiques inédits.
Il est sans doute inutile de rappeler ici à quel point les tropismes céliniens diffèrent des tropismes maurrassiens. Attiré par la Méditerranée et l’Antiquité gréco-latine, Maurras eut une inclination pour le fascisme italien tout en vitupérant contre l’Allemagne dont il fut, tout au long de sa vie, un farouche adversaire. Alors même que Céline considérait cette germanophobie contre nature et porteuse de nouveaux périls. Dans un article paru en 1942, « La France de M. Maurras », son ami Lucien Combelle stigmatisait, lui aussi, cette germanophobie. Ce qui lui attira un commentaire acerbe de Céline lui reprochant de passer à côté de ce qui était pour lui l’essentiel : l’antiracisme de Maurras déjà tancé quatre ans auparavant dans L’École des cadavres. À la suite d’Urbain Gohier, Céline soupçonnait même des origines sémites au leader de l’Action Française.
À ce propos, signalons que l’unique livre consacré à Combelle vient d’être réédité dans cette même collection « Bouquins » avec d’autres livres de Pierre Assouline sur la période de l’Occupation : ses romans (La cliente, Lutetia, Sigmaringen), sa biographie de Jean Jardin et son essai sur l’épuration des intellectuels. C’est dire si cette période fascine depuis toujours Assouline qui s’en explique dans une préface inédite, « Apologie de la zone grise ». Il y évoque avec nuance sa relation à cette histoire complexe. Laquelle n’était pas faite que de héros et de salauds. Comment d’ailleurs qualifier un jeune Français d’une vingtaine d’années acceptant de risquer sa vie sur le front de l’Est pour des idées qu’il croit justes ? Le juif sépharade qu’est Assouline fut l’ami de Combelle qui, non seulement crut au fascisme, mais en fut un ardent militant jusqu’en juillet 1944. Cette amitié l’honore, cela va sans dire, mais ce qui le distingue encore davantage de la plupart de ses confrères, c’est le refus de tout manichéisme. Et le goût de comprendre avant de juger.
La correspondance de Céline à Combelle a été éditée par Éric Mazet dans L’Année Céline 1995 (Du Lérot, 1996, pp. 68-156). Signalons aussi l’émission télévisée de Bernard Pivot sur « Les intellectuels et la Collaboration » (Apostrophes, 1er décembre 1978) à laquelle Combelle participa [https://www.youtube.com/watch?v=IcgWGFwt7nQ] et la série d’entretiens que Pierre Assouline eut avec lui (À voix nue, France Culture, 25-29 juillet 1988) [https://www.youtube.com/watch?v=D6rWO3pEPdc].
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La Sociedad "Oswald Spengler" ha concedido el Primer Premio que lleva el propio nombre de la entidad académica al famoso escritor Michel Houellebecq en un acto que se celebró en un hotel de Bruselas el pasado viernes, 19 de octubre.
Houellebecq es un escritor mundialmente famoso por su novela "Sumisión", obra polémica e inquietante, que plantea un futuro oscuro para una República Francesa islamizada en un grado muy elevado. El escritor no ha tardado en ser acusado de "islamofobia", ataque ante el cual responde que lo único que ha hecho es adelantar acontecimientos, siguiendo racionalmente las tendencias que ya se observan en el país galo y en otras naciones de occidente. La novela se ha traducido al español en la editorial Anagrama. En esa Francia alienada que hoy podemos conocer, la Sorbona se ha convertido en una Escuela Coránica, las mujeres francesas adoptan masivamente vestimentas musulmanas, y una formación política mahometana se hace dueña de las urnas de un país occidental.
Tal como reza en su propia página web, "la Sociedad Oswald Spengler para el Estudio de la Humanidad y de la Historia Mundial está dedicada al estudio comparativo de las culturas y las civilizaciones, incluyendo la prehistoria, la evolución de la humanidad entendida como un todo, así como las extrapolaciones que consideran el posible futuro del hombre". Se trata de una sociedad académica internacional que toma su inspiración de los trabajos e ideas del filósofo alemán Oswald Spengler (1880-1936), con ánimo de revisarlos, ponerlos al día y examinarlos críticamente, pero que también se marca el propósito de realizar un trabajo interdisciplinar que incluye materias como la teoría evolucionista, la sociobiología, la filosofía, la psicología, la jurisprudencia y la arqueología. En la dirección de dicha Sociedad figuran el famoso economista alemán Max Otte, así como los profesores David Engels y Gerd Morgenthaler.
El pensador germano Spengler elaboró toda una teoría cíclica sobre las grandes civilizaciones mundiales. Éstas, al igual que los seres vivos, nacen, crecen y finalmente –tras un envejecimiento o declinar- mueren. En contradicción y hostilidad abierta con el nazismo, Spengler nunca defendió la supremacía de la civilización occidental sobre las otras, ni aprobó las tesis racistas o biológicas que, de manera pseudocientífica, apoyan una superioridad "aria". Antes al contrario, su pensamiento es pluralista, estableciendo la comparación entre la Historia de la Humanidad y un jardín de plantas de la más variada especie. Cada planta (civilización) posee su propio ritmo y ciclo, y en el primer tercio del siglo XX Spengler trató de comprender ésta fase senil en la que se encuentra Europa en su famosa obra La Decadencia de Occidente.
El profesor de Historia de Roma, David Engels, de la Universidad Libre de Bruselas, explica los motivos por los que Houellebecq ha obtenido este Primer Premio de la Sociedad "Spengler", dotado con una cuantía de 10.000 euros:
"Nosotros buscábamos un pensador merecedor del mismo, en continuidad intelectual con Spengler. Para nosotros, de entre los autores actuales, Michel Houellebecq representa de la manera más palpable este ambiente melancólico de un Occidente cínico que ha perdido todas sus esperanzas y se prepara para abandonarse a sí mismo. Su "Sumisión" anuncia el naufragio del sistema universitario occidental, el fin de la democracia europea, la creación de un Estado franco-mediterráneo autoritario en manos de un presidente conservador y la islamización de Europa, es una novela que no puede ser más spengleriana." (Entrevista a D. Engels en el medio belga "Le Vif")
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Par Yann P. Caspar
Ex: https://visegradpost.com
« Voici la terrible histoire de Philippe Ignace Semmelweis ». C’est ainsi que le Docteur Destouches amorce la préface de 1936 à la première édition commerciale de sa Thèse de Médecine, soutenue douze ans plus tôt à Paris, et ayant pour sujet la vie et l’oeuvre du plus célèbre médecin hongrois. Alors qu’on omet aisément de rappeler qu’avant de s’illustrer par une production littéraire hors du commun, Céline est avant tout un médecin sincèrement convaincu de sa vocation, cette thèse peut se lire comme l’étincelle qui allumera la flamme du style célinien et une lumineuse évocation du destin maudit des deux hommes.
D’une patte narguant continuellement les standards de la rédaction scientifique, Céline raconte le toujours plus insoutenable agacement de ce jeune obstétricien hongrois découvreur de l’asepsie face à la crasse et jalouse ignorance de ses confrères viennois. Peignant un monde médical majoritairement composé d’esprits invariablement tièdes, étroits et mesquins, Céline fait de Semmelweis l’archétype du génie s’acharnant passionnément à vouloir imposer ce qu’il pense être juste et vrai, sans bien sûr s’encombrer inutilement du moindre tact mondain. Quiconque sait le parcours de Céline pourra ainsi voir dans ce texte de 1924 une étonnante et splendide prophétie auto-réalisatrice rédigée par le futur prostré de Meudon, où vivant chichement ses dernières années de pestiféré avec sa femme Lucette, coupé du monde et clochardesque devant ses rares visiteurs, il écrira coup sur coup trois chefs d’oeuvre absolus : D’un château l’autre, Nord et Rigodon.
Quel est donc le génie d’un Semmelweis ? Exerçant dans une clinique où la fièvre puerpérale ravage les femmes en couche, surtout lorsque celles-ci sont tripotées par des étudiants ayant plus tôt effectué des dissections, Semmelweis comprend que cette mortalité massive est directement liée à la propagation de miasmes cadavériques dans les organes génitaux féminins. Déjà persuadé que la cause de ces décès se trouve au sein de la clinique même, son déclic survient le jour où son ami Kolletschka, souffrant d’une blessure au scalpel contractée lors d’une dissection, meurt des suites de symptômes similaires à ceux de la fièvre puerpérale.
Commentant cette révélation, Céline se plaît à souligner qu’elle intervient au retour du jeune Hongrois d’un voyage de plusieurs mois à Venise. Profondément ému par la beauté de cette ville, Semmelweis aurait tout naturellement flairé l’évidence : la pourriture cadavérique est à l’origine de la fièvre puerpérale. Ébloui par le génie de Philippe, Louis préfigure alors le sien : « La Musique, la Beauté sont en nous et nulle part ailleurs dans le monde insensible qui nous entoure. Les grandes œuvres sont celles qui réveillent notre génie, les grands hommes sont ceux qui lui donnent une forme »1.
Les accoucheurs se lavent les mains et la mortalité se met à dégringoler. Aux quatre coins de l’Europe, les médecins, tout réputés qu’ils soient, se mobilisent contre ce ridicule et vaniteux Hongrois, et entendent bien mettre un terme à cette folie hygiéniste. Semmelweis est mis à l’index, on l’humilie et l’invite prestement à rejoindre Budapest. Il arrive dans une capitale hongroise en pleine effervescence, peu de temps après le déclenchement des événements de 1848. Ce trentenaire banni de médecine s’éprend de politique avant de plonger dans une sérieuse dépression suite à la défaite des révolutionnaires. Bien que Céline n’ait jamais montré de tropisme centre-européen — et a fortiori une passion pour la Hongrie —, il met brillamment le doigt sur un caractère national hongrois : la propension magyare à savourer trop rapidement une victoire avant de se laisser happer par un état de mélancolie aggravé ; en somme, la Hongrie : une nation dont l’histoire n’est qu’une succession de sauteries sans lendemain.
L’histoire de Philippe Ignace Semmelweis, c’est celle de Louis-Ferdinand Céline. C’est celle de deux tarés se sentant dès leur adolescence investis d’une mission contre la bassesse et la lourdeur de notre monde. Reniés, exclus, ils crient, vocifèrent ; ils délirent. Ils savent que le talent est monnaie courante, alors que le génie est rare. Le talent procède de la matière grise, il est froid. Ils montrent qu’il n’y a guère que la chaleur des émotions et des tripes pour transformer le talent en génie. Imposer son génie à la société est possible en maîtrisant les codes des relations humaines — qualité que possédait assurément Louis Pasteur pour théoriser et faire reconnaître ce que le furieux Semmelweis avait senti avant lui.
1 Louis-Ferdinand Céline, Semmelweis, Collection L’Imaginaire, Gallimard, 1999, Paris, p. 67
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Simone Weil, George Orwell et Georges Bernanos font partie des références incontournables d’une certaine droite réfractaire aux slogans libéraux et économicistes. Compatriote forézien originaire de l’industrieuse vallée de l’Ondaine aux portes du Velay, Thomas Renaud vient d’écrire une agréable biographie sur l’auteur de Monsieur Ouine dans la collection « Qui suis- je ? ». Depuis plusieurs années, les livres ne cessent de se multiplier sur le natif au 26, rue Joubert à Paris. Si l’ouvrage de Thomas Renaud ne vise pas à l’exhaustivité, il apporte un éclairage raisonné sur une grande figure spirituelle, littéraire et culturelle !
Contre l’hémiplégie politique
Soixante-dix ans après sa mort, Georges Bernanos fait toujours l’objet d’interprétations intéressées. Certaines se focalisent sur le romancier et ignorent l’essayiste et le polémiste. D’autres, au contraire, valorisent le pamphlétaire et écartent son œuvre romanesque. Thomas Renaud a le mérite de montrer que ces deux facettes forment un seul ensemble de manière irrécupérable. « Complexe et torturé, dans la mesure où il n’a jamais voulu faire taire les appels de son âme, Bernanos a porté avec lui les violents paradoxes de la nature humaine, sans que ne soient jamais trahies ses plus profondes convictions. Catholique, royaliste, anti-démocrate, anti-clérical et anti-moderne, ennemi des bourgeois et partisan des petits jusqu’à la mauvaise foi, il demeura tout cela à la fois, depuis son adolescence jusqu’à son dernier souffle. D’un côté, les “ droitards ” se fourvoient en dénonçant en lui un traître passé à gauche, de l’autre, certains néo-bernanosiens se trompent également en occultant l’admiratif disciple de Drumont, le militant de rue de l’Action française, le solide soldat des tranchées et le chrétien intégral (p. 114). »
C’est fort bien vu à un moment où certaines feuilles de choux mensuelles richement illustrées et intellectuellement vides – pensons à L’Imbécile – le revendiquent avec excès. Militant royaliste intégral, Bernanos a toujours eu la fibre sociale, d’où son engagement au Cercle Proudhon avant la Grande Guerre. Aujourd’hui – et sans faire parler les morts à la façon bolchevique -, le jeune Bernanos aurait probablement milité au Bastion social si injustement décrié par quelques petits bourges néo-conservateurs. Son œuvre se comprend à l’aune de sa détestation de l’injustice. C’est contre l’injustice grasse faite à la mémoire de l’auteur de La France juive qu’il rédige ce remarquable ouvrage, La Grande Peur des bien-pensants. C’est contre un monde tragique qu’il publie Sous le Soleil de Satan et Nouvelle histoire de Mouchette. C’est contre une répression qu’il estime inique de la part des nouveaux croisés de libération nationale qu’il s’indigne dans Les Grands Cimetières sous la lune. C’est contre une « étrange défaite » (Marc Bloch) en 1940 que depuis son exil brésilien, il se rallie à un général de brigade à titre temporaire qui sait s’exprimer à la radio, devenant ainsi le premier écrivain de la France libre. C’est contre une Technique devenue folle et meurtrière au lendemain de la Seconde Guerre mondiale qu’il sort La France contre les robots. Qui aurait de nos jours l’audace de signer une France contre Facebook, Apple, Google et Amazon ?
Les colères d’un chrétien intégral
Au moment des Grands Cimetières sous la lune, des critiques ont cru que Georges Bernanos allait prendre la voie royale vers les notables et, pourquoi pas ?, l’Académie française. Ils se trompaient complètement. En effet, Georges Bernanos n’a jamais plongé dans l’eau tiède de la gloriole médiatique de son temps. Plus que Français du XXe siècle, Bernanos se sentait Chrétien surgi du « beau Moyen Âge », de ce siècle des cathédrales gothiques et du souverain sacré de Justice sous son chêne, Louis le Neuvième. Au soir de sa vie, il écrit Le Dialogue des carmélites au ton plus que contre-révolutionnaire, franchement réactionnaire et anti-révolutionnaire. Thomas Renaud rappelle que ce texte fut à maintes reprises adapté au théâtre, mais c’est en 1952, « la création de Tassencourt [qui] remporta les suffrages quasi unanimes de la critique (p. 109) ». Marcelle Tassencourt, l’épouse et l’égérie de Thierry Maulnier dont le cheminement intellectuel prit une direction assez parallèle à celui de Bernanos…
Du fait des impératifs du volume, l’auteur s’intéresse à la vie de Georges Bernanos, quitte à reléguer au second plan sa vision politique. Elle demeure cependant bien présente pour expliquer les prises de position virulentes d’un fervent chrétien inquiet de l’avenir de la foi et des fidèles. Attention au contre-sens ! Bernanos se moque du sort des États modernes. Ce catholique a compris que la modernité est en perdition, elle est la perdition et correspond à la Chute de l’Homme adamique. D’où la démarche de son biographe. « Il nous semblait préférable de présenter aux lecteurs qui le connaissaient mal un Bernanos vivant, sans l’habituelle hémiplégie intellectuelle des lecteurs “ de droite ” et “ de gauche ”. Sébastien Lapaque a fait beaucoup pour rendre ce Bernanos “ en bloc ” que trop de critiques avaient divisé. Cette petite biographie doit ouvrir largement sur l’œuvre et permettre une belle amitié avec un auteur particulièrement attachant, qui n’a jamais souhaité jouer la comédie (1). »
Thomas Renaud insiste néanmoins sur la genèse méconnue de La Grande Peur des bien-pensants. « Le choix du titre sera l’occasion de combats homériques entre l’auteur et les lecteurs de la maison. “ Un témoin de la race ” ? Refusé. “ Au bord des prochains charniers ” ? Refusé. “ Démission de la France ” ? Encore refusé. Dans une dernière tentative, Bernanos propose “ La Grande Peur des bien-pensants ”. Il tient également à ce que le nom d’Édouard Drumont apparaisse en sous-titre. L’éditeur acquiesce à sa première demande et repousse la seconde (p. 65). » Quel vertige si l’un de ces premiers titres avait été adopté !
Résistance manquée à la Modernité
L’auteur aurait pu mieux confronter Georges Bernanos à Ernst Jünger qui, par bien des aspects, peut être vu comme le premier des bernanosiens, lui, le porteur de la décoration « Pour le Mérite » qui se convertit au catholicisme romain en espérant que l’Église catholique contiendrait le déploiement de la Modernité. Ne soyons toutefois pas sévère d’autant que cela pourrait servir de trame à un prochain essai… « Espérons, craint-il, ne pas avoir rejoint, par ces quelques pages, la cohorte des imbéciles (p. 113). » Qu’il soit rassuré ! Cette cohorte ne l’a pas rencontré.
« Au soir de sa vie, prévient encore Thomas Renaud, Bernanos affirmait ne plus écrire pour ses contemporains, mais pour leurs arrière-petits-fils (p. 9). » Voulait-il vraiment avoir des disciples ? « Son œuvre nous ferait volontiers répondre par la négative. Du moins si l’on entend par là qu’il souhaitait “ faire école ”, répond-il encore. L’échec supposé de l’école maurrassienne – solide école de pensée, mais finalement d’inaction – avait probablement défavorablement marqué l’ancien Camelot du roi. Cela n’a pas empêché l’écrivain d’avouer écrire pour les générations futures qui, elles, seraient à même de comprendre ses cris et répondre à ses appels (2). » L’auteur des Enfants humiliés ne savait pas que le monde archi-moderne bouleverserait jusqu’au tréfond de l’âme humaine, y compris au sein de sa propre famille. Il y a une quinzaine d’années, une université d’été du FNJ s’était placé sous son patronage. Largement versée dans le cosmopolitisme, l’anti-fascisme de pacotille et la « grillade » urbaine de voitures de police républicaine (vieux reliquat de l’anti-républicanisme de l’auguste aïeul ?), les héritiers de l’écrivain s’élevèrent contre cette « atteinte à sa mémoire ». Pour paraphraser Philippe de Villiers qui parlait de la descendance de Charles de Gaulle, « Georges Bernanos était un chêne, ses petits-enfants sont des glands ». Bernanos n’a pas empêché la reddition totale de la France.
Georges Feltin-Tracol
Notes
1 : Thomas Renaud, « Bernanos, ou l’homme face au salut » (entretien avec Anne Le Pape), dans Présent du 11 août 2018.
2 : Idem.
• Thomas Renaud, Georges Bernanos, Pardès, coll. « Qui suis-je ? », 2018, 128 p., 12 €.
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Bulletin célinien, n°410, septembre 2018
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Céline et Joyce
Un débat sur la réédition des pamphlets
Clément Rosset et Céline
Maurice Lemaître et l’ “Association israélite pour la réconciliation des Français”
Un grand livre sur Roger Nimier
En arrière-plan de ce colloque : la polémique suscitée par le projet de réédition des pamphlets par les éditions Gallimard. Une table ronde réunissant diverses personnalités fut organisée en ouverture du colloque. Nous en rendons compte dans ce numéro. À l’exception notable de Philippe Roussin, directeur de recherches au CNRS, il faut noter que tous les spécialistes de Céline sont favorables à cette réédition. Hormis François Gibault, qui s’est fait durant un demi-siècle le porte-parole de l’ayant droit ³, observons que cela a toujours été le cas. Il y a plus de trente ans déjà, nous avons publié ici leurs appréciations 4. Dont celle de Henri Godard qui, contrairement à ce qui fut sous-entendu lors de cette table ronde, s’exprima dès le début de manière claire : « Plus l’audience des textes disponibles en librairie s’accroît, plus il devient anormal que les mêmes lecteurs n’aient accès qu’en bibliothèque ou au prix du commerce spécialisé, aux écrits qu’ils trouvent cités, interprétés et jugés dans des travaux critiques. »
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par Nicolas Bonnal
Ex: http://www.dedefensa.org
Reparlons de la fin de l’histoire…
La catastrophe est arrivée avec Louis-Philippe, tout le monde devrait le savoir (cela me rappelle je ne sais quel journaliste royaliste qui me demandait si j’étais orléaniste ou légitimiste. On est légitimiste ou on n’est pas monarchiste, voilà tout). Depuis, on barbote. Voyez l’autre avec sa banque Rothschild et sa soumission aux patrons anglo-saxons.
Balzac c’est la comédie humaine et c’est aussi la recherche de l’absolu qui n’aboutit plus - et on n’a rien fait de mieux depuis. Car Balzac a compris mieux que tout le monde le monde moderne, peut-être mieux que Guénon même (à savoir que les résurrections et recommandations spirituelles seraient des potions, des simulacres).
Extraits de Z. Marcas, petite nouvelle méconnue, prodigieuse. On commence par la chambre de bonne :
« Comment espère-t-on faire rester les jeunes gens dans de pareils hôtels garnis ? Aussi les étudiants étudient-ils dans les cafés, au théâtre, dans les allées du Luxembourg, chez les grisettes, partout, même à l’École de Droit, excepté dans leur horrible chambre, horrible s’il s’agit d’étudier, charmante dès qu’on y babille et qu’on y fume. »
Les études professionnelles comme on dit au Pérou, de médecin, d’avocat, sont déjà des voies bouchées, observe le narrateur avec son ami Juste :
« Juste et moi, nous n’apercevions aucune place à prendre dans les deux professions que nos parents nous forçaient d’embrasser. Il y a cent avocats, cent médecins pour un. La foule obstrue ces deux voies, qui semblent mener à la fortune et qui sont deux arènes… »
Une observation sur la pléthorique médecine qui eût amusé notre Céline :
« L’affluence des postulants a forcé la médecine à se diviser en catégories : il y a le médecin qui écrit, le médecin qui professe, le médecin politique et le médecin militant ; quatre manières différentes d’être médecin, quatre sections déjà pleines. Quant à la cinquième division, celle des docteurs qui vendent des remèdes, il y a concurrence, et l’on s’y bat à coups d’affiches infâmes sur les murs de Paris. »
Oh, le complexe militaro-pharmaceutique ! Oh, le règne de la quantité !
Les avocats et l’Etat :
« Dans tous les tribunaux, il y a presque autant d’avocats que de causes. L’avocat s’est rejeté sur le journalisme, sur la politique, sur la littérature. Enfin l’État, assailli pour les moindres places de la magistrature, a fini par demander une certaine fortune aux solliciteurs. »
Cinquante ans avant Villiers de l’Isle-Adam Balzac explique le triomphe de la médiocrité qui maintenant connaît son apothéose en Europe avec la bureaucratie continentale :
« Aujourd’hui, le talent doit avoir le bonheur qui fait réussir l’incapacité ; bien plus, s’il manque aux basses conditions qui donnent le succès à la rampante médiocrité, il n’arrivera jamais. »
Balzac recommande donc comme Salluste (et votre serviteur sur un plateau télé) la discrétion, l’éloignement :
« Si nous connaissions parfaitement notre époque, nous nous connaissions aussi nous-mêmes, et nous préférions l’oisiveté des penseurs à une activité sans but, la nonchalance et le plaisir à des travaux inutiles qui eussent lassé notre courage et usé le vif de notre intelligence. Nous avions analysé l’état social en riant, en fumant, en nous promenant. Pour se faire ainsi, nos réflexions, nos discours n’en étaient ni moins sages, ni moins profonds. »
On se plaint en 2018 du niveau de la jeunesse ? Balzac :
« Tout en remarquant l’ilotisme auquel est condamnée la jeunesse, nous étions étonnés de la brutale indifférence du pouvoir pour tout ce qui tient à l’intelligence, à la pensée, à la poésie. »
Liquidation de la culture, triomphe idolâtre de la politique et de l’économie :
« Quels regards, Juste et moi, nous échangions souvent en lisant les journaux, en apprenant les événements de la politique, en parcourant les débats des Chambres, en discutant la conduite d’une cour dont la volontaire ignorance ne peut se comparer qu’à la platitude des courtisans, à la médiocrité des hommes qui forment une haie autour du nouveau trône, tous sans esprit ni portée, sans gloire ni science, sans influence ni grandeur. »
Comme Stendhal, Chateaubriand et même Toussenel, Balzac sera un nostalgique de Charles X :
« Quel éloge de la cour de Charles X, que la cour actuelle, si tant est que ce soit une cour ! Quelle haine contre le pays dans la naturalisation de vulgaires étrangers sans talent, intronisés à la Chambre des Pairs ! Quel déni de justice ! quelle insulte faite aux jeunes illustrations, aux ambitions nées sur le sol ! Nous regardions toutes ces choses comme un spectacle, et nous en gémissions sans prendre un parti sur nous-mêmes. »
Balzac évoque la conspiration et cette époque sur un ton qui annonce Drumont aussi (en prison, Balzac, au bûcher !) :
« Juste, que personne n’est venu chercher, et qui ne serait allé chercher personne, était, à
vingt-cinq ans, un profond politique, un homme d’une aptitude merveilleuse à saisir les rapports lointains entre les faits présents et les faits à venir. Il m’a dit en 1831 ce qui devait arriver et ce qui est arrivé : les assassinats, les conspirations, le règne des juifs, la gêne des mouvements de la France, la disette d’intelligences dans la sphère supérieure, et l’abondance de talents dans les bas-fonds où les plus beaux courages s’éteignent sous les cendres du cigare. Que devenir ? »
Les Français de souche qui en bavent et qui s’expatrient ? Lisez Balzac !
« Être médecin n’était-ce pas attendre pendant vingt ans une clientèle ? Vous savez ce qu’il est devenu ? Non. Eh ! bien, il est médecin ; mais il a quitté la France, il est en Asie. »
La conclusion du jeune grand homme :
« J’imite Juste, je déserte la France, où l’on dépense à se faire faire place le temps et l’énergie nécessaires aux plus hautes créations. Imitez-moi, mes amis, je vais là où l’on dirige à son gré sa destinée. »
Homo festivus… Chez Balzac il y a toujours une dérision bien française face aux échecs de la vie et du monde moderne et déceptif.
Il y a une vingtaine d’années j’avais rappelé à Philippe Muray que chez Hermann Broch comme chez Musil (génie juif plus connu mais moins passionnant) il y avait une dénonciation de la dimension carnavalesque dans l’écroulement austro-hongrois.
Chez Balzac déjà on veut s’amuser, s’éclater, fût-ce à l’étranger. Il cite même Palmyre :
« Après nous être longtemps promenés dans les ruines de Palmyre, nous les oubliâmes, nous étions si jeunes ! Puis vint le carnaval, ce carnaval parisien qui, désormais, effacera l’ancien carnaval de Venise, et qui dans quelques années attirera l’Europe à Paris, si de malencontreux préfets de police ne s’y opposent. On devrait tolérer le jeu pendant le carnaval ; mais les niais moralistes qui ont fait supprimer le jeu sont des calculateurs imbéciles qui ne rétabliront cette plaie nécessaire que quand il sera prouvé que la France laisse des millions en Allemagne. Ce joyeux carnaval amena, comme chez tous les étudiants, une grande misère… »
Puis Balzac présente son Marcas – très actuel comme on verra :
« Il savait le Droit des gens et connaissait tous les traités européens, les coutumes internationales. Il avait étudié les hommes et les choses dans cinq capitales : Londres, Berlin, Vienne, Petersburg et Constantinople. Nul mieux que lui ne connaissait les précédents de la Chambre. »
Les élites ? Balzac :
« Marcas avait appris tout ce qu’un véritable homme d’État doit savoir ; aussi son étonnement fut-il excessif quand il eut occasion de vérifier la profonde ignorance des gens parvenus en France aux affaires publiques. »
Il devine le futur de la France :
« En France, il n’y aura plus qu’un combat de courte durée, au siège même du gouvernement, et qui terminera la guerre morale que des intelligences d’élite auront faite auparavant. »
Les politiques, les sénateurs US comme des marionnettes, comme dans le Parrain. Balzac :
« En trois ans, Marcas créa une des cinquante prétendues capacités politiques qui sont les raquettes avec lesquelles deux mains sournoises se renvoient les portefeuilles, absolument comme un directeur de marionnettes heurte l’un contre l’autre le commissaire et Polichinelle dans son théâtre en plein vent, en espérant toujours faire sa recette. »
Corleone Marcas est comme un boss, dira Cochin, qui manipule ses mannequins :
« Sans démasquer encore toutes les batteries de sa supériorité, Marcas s’avança plus que la première fois, il montra la moitié de son savoir-faire ; le ministère ne dura que cent quatre-vingts jours, il fut dévoré. Marcas, mis en rapport avec quelques députés, les avait maniés comme pâte, en laissant chez tous une haute idée de ses talents. Son mannequin fit de nouveau partie d’un ministère, et le journal devint ministériel. »
Puis Balzac explique l’homme moderne, électeur, citoyen, consommateur, politicard, et « ce que Marcas appelait les stratagèmes de la bêtise : on frappe sur un homme, il paraît convaincu, il hoche la tête, tout va s’arranger ; le lendemain, cette gomme élastique, un moment comprimée, a repris pendant la nuit sa consistance, elle s’est même gonflée, et tout est à recommencer ; vous retravaillez jusqu’à ce que vous ayez reconnu que vous n’avez pas affaire à un homme, mais à du mastic qui se sèche au soleil. »
Et comme s’il pensait à Trump ou à nos ex-vingtième siècle, aux promesses bâclées des politiciens, Balzac dénonce « la difficulté d’opérer le bien, l’incroyable facilité de faire le mal. »
Et comme s’il fallait prouver que Balzac est le maître :
« …il y a pour les hommes supérieurs des Shibolet, et nous étions de la tribu des lévites modernes, sans être encore dans le Temple. Comme je vous l’ai dit, notre vie frivole couvrait les desseins que Juste a exécutés pour sa part et ceux que je vais mettre à fin. »
Et sur l’éternel présent de la jeunesse mécontente :
« La jeunesse n’a pas d’issue en France, elle y amasse une avalanche de capacités méconnues, d’ambitions légitimes et inquiètes, elle se marie peu, les familles ne savent que faire de leurs enfants ; quel sera le bruit qui ébranlera ces masses, je ne sais ; mais elles se précipiteront dans l’état de choses actuel et le bouleverseront. »
Vingt ans plus tard Flaubert dira que le peuple aussi est mort, après les nobles, les clercs et les bourgeois, et qu’il ne reste que la tourbe canaille et imbécile qui a gobé le Second Empire, qui marque le début de notre déclin littéraire. Si on sait pour qui vote la tourbe, on ne sait toujours pas pourquoi.
Balzac rajoute :
« Louis XIV, Napoléon, l’Angleterre étaient et sont avides de jeunesse intelligente. En France, la jeunesse est condamnée par la légalité nouvelle, par les conditions mauvaises du principe électif, par les vices de la constitution ministérielle. »
C’est JMLP qui disait un jour à notre amie Marie que 80% de nos jeunes diplômés fichent le camp. On était en 2012 ! Circulez, y’a de l’espoir…
Le piège républicain expliqué en une phrase par notre plus garnd esprit moderne (royaliste et légitimiste comme Tocqueville et Chateaubriand et Baudelaire aussi à sa manière) :
« En ce moment, on pousse la jeunesse entière à se faire républicaine, parce qu’elle voudra voir dans la république son émancipation. »
La république donnera comme on sait le radical replet, le maçon obtus, le libéral Ubu et le socialiste ventru !
Z. Marcas. Lisez cette nouvelle de seize pages, qui énonce aussi l’opposition moderne entre Russie et monde anglo-saxon !
On laisse le maître conclure : « vous appartenez à cette masse décrépite que l’intérêt rend hideuse, qui tremble, qui se recroqueville et qui veut rapetisser la France parce qu’elle se rapetisse. »
Et le patriote Marcas en mourra, prophète du déclin français :
« Marcas nous manifesta le plus profond mépris pour le gouvernement ; il nous parut douter des destinées de la France, et ce doute avait causé sa maladie…Marcas ne laissa pas de quoi se faire enterrer…
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Bulletin célinien n°408 (juin 2018)
Sommaire :
En marge des “Lettres familières”
Céline, le négatif et le trait d’union
Enquête sur le procès Céline [1950]
Lettres d’Alphonse Juilland à Éric Mazet (2)
Antoine Gallimard et Pierre Assouline parlent.
Angie David
En revanche, une part de son œuvre est assurément maudite au point qu’un projet de réédition a suscité de vives réactions que la plus haute autorité de l’État a estimé légitimes. La plupart des célinistes, eux, ressassent la même antienne : certes ces écrits sont intolérables mais certains passages peuvent en être sauvés. Et de citer invariablement la description de Leningrad dans Bagatelles et l’épilogue des Beaux draps. C’est perdre de vue que Céline ne perd nullement son talent dans l’invective même lorsqu’il est outrancier. Si l’on se reporte au dossier de presse de Bagatelles, on voit, au-delà des clivages idéologiques, à quel point les critiques littéraires pouvaient alors le reconnaître. « La frénésie, l’éloquence, les trouvailles de mots, le lyrisme enfin sont très souvent étonnants », relevait Marcel Arland dans La Nouvelle Revue Française. Charles Plisnier, peu suspect de complaisance envers l’antisémitisme, évoquait « un chef-d’œuvre de la plus haute classe » ². Dans une récente émission télévisée, un célinien en lut plusieurs extraits qu’il jugeait littérairement réussis, notamment l’un daubant la Russie soviétique. Passage coupé au montage. Seule la description de Leningrad a précisément été retenue.Autre réflexion: si Céline est reconnu comme un écrivain important, il n’en demeure pas moins qu’il est tenu à l’écart par l’école et l’université. Hormis Voyage au bout de la nuit et, dans une moindre mesure Mort à crédit, ses romans sont absents des programmes scolaires. Quant à l’université, on doit bien constater qu’elle organise très peu de séminaires sur son œuvre et que, parmi les universitaires habilités à diriger des recherches, rares sont ceux qui acceptent de diriger un travail sur Céline. Conséquence : le nombre de thèses à lui consacrées est en nette baisse par rapport au siècle précédent. On se croirait revenu aux années où Frédéric Vitoux puis Henri Godard rencontrèrent tous deux des difficultés à trouver un directeur de thèse. Et cela ne risque pas de s’arranger dans les années à venir.
• Angie DAVID (éd.), Réprouvés, bannis, infréquentables, Éditions Léo Scheer, 2018, 275 p. (20 €).
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Bulletin célinien n°407
Sommaire :
Entretien avec Henri Godard
Éditeur de Céline
L’intercesseur
Quarante années de recherches céliniennes.
La dette que les céliniens ont contractée envers Henri Godard est considérable. On songe évidemment en premier lieu à cette magistrale édition critique de l’œuvre romanesque dans la Pléiade. Que ce soit sur la génétique des textes, l’établissement des variantes, les liens entre création et expérience vécue, l’étude narrative et stylistique, il a accompli un travail à la fois rigoureux et éclairant. De sa thèse de doctorat sur la poétique de Céline soutenue il y a plus de trente ans à sa biographie qui vient d’être rééditée en collection de poche ¹, il aura sans nul doute été l’exégète le plus pénétrant de Céline. Et il a constamment mis l’accent sur l’unité d’une œuvre qui « contrairement à l’impression générale, demeure assez mal connue dans son ensemble comme dans sa distribution ² ».
« Nous avons en commun de travailler à donner à Céline, en dépit des handicaps, toute la place qui est la sienne », m’a-t-il écrit un jour. C’était aussi reconnaître implicitement tout ce qui nous sépare. L’un des mérites d’Henri Godard aura été de surmonter ce qui aurait pu l’empêcher de vouer une grande partie de sa carrière à l’œuvre d’un homme dont il est si éloigné. Dans son dernier livre sur Céline, il ne dissimule pas les tourments que cela a pu susciter sur le plan personnel : « Autour de moi, dans mon entourage proche, même si on a depuis longtemps cessé de me le dire, pour certains – mes amis juifs naturellement en particulier –, ce choix n’en continue pas moins à faire problème. Ils auraient préféré que je m’attache à un autre auteur. Entre eux et moi, par intermittence, à l’occasion d’une nouvelle publication par exemple, je sens passer une onde à peine perceptible de gêne. » Et les choses vont parfois plus loin comme lorsque l’un de ses pairs l’accuse de complaisance envers l’écrivain ³.
Henri Godard n’écrira plus sur Céline. Il considère qu’il a dit sur le sujet tout ce qu’il avait à dire. Il n’était que temps de lui rendre hommage et de lui exprimer notre gratitude. En publiant la transcription d’un des plus intéressants entretiens qu’il ait donnés à la presse radiophonique. Plus loin, deux céliniens de la nouvelle génération saluent avec reconnaissance leur aîné tandis que Jean-Paul Louis, avec lequel il fonda la revue L’Année Céline, explique pertinemment en quoi son travail d’éditeur dans la Pléiade est digne de tous les éloges.
Ce passionné de littérature n’a jamais méconnu le pamphlétaire intraitable que fut Céline. En revanche il s’est toujours insurgé lorsque certains voulaient le repeindre en « un second Drumont », c’est-à-dire « un individu qui n’[aurait] jamais pensé qu’à propager son credo raciste, utilisant à l’occasion pour cela la voie indirecte ou camouflée du roman 4. » C’est tout l’honneur d’Henri Godard d’avoir défendu l’écrivain malgré les préventions, les embûches et les dénigreurs de tout acabit.
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Bulletin célinien n°406 (avril 2018)
Sommaire :
Élizabeth, une vie célinienne
Rencontre avec Jean Monnier
Le bras de fer entre Gallimard et le Crif continue
La nouvelle épuration littéraire
Lettres d’Alphonse Juilland à Éric Mazet (I).
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« Je n’ai jamais été démocrate », « Je ne suis pas anti-démocrate » ; voici deux phrases qui semblent illustrer le paradoxe de Bernanos. Royaliste qui fait l’apologie du « mouvement de 1789 », reconnaissant que le roman national est un bloc que l’on ne peut qu’assumer totalement ou renier totalement, camelot du roi qui abjura son passé militant à l’Action Française après s’être brouillé avec Charles Maurras, Georges Bernanos n’est pas de ceux que l’on puisse coller une confortable étiquette, encore moins à l’aune d’un clivage contemporain. En réalité, au moment où Bernanos rentra du Brésil et écrivit sa France contre les Robots, la notion de partis et de clivages politiques ne revêtaient plus la moindre espèce d’importance à ses yeux. Seul l’obnubile le génocide culturel que la civilisation des machines s’apprêta à commettre, et commença même déjà à commettre comme il le constata dès son retour à Paris, où il déplora la désertion de l’idéal révolutionnaire au profit d’un conformiste mortifère chez ses contemporains. Or, ce qui est la cause principale de ce désistement, et l’incapacité totale de la politique à résoudre la question de la Technique, tient à ce qu’il nomme « l’usurpation bourgeoise » dans Le Chemin de la Croix des Âmes, soit l’idée qu’une caste domine le système, peu importe la forme que revêt son régime politique.
Dans Les grands cimetières sous la Lune, Georges Bernanos tenait en effet la démocratie pour une invention d’intellectuels, mais « au même titre que la monarchie de Joseph de Maistre ». Cette comparaison récurrente entre la démocratie comme régime faible en proie aux prédations financières et une monarchie aux mains d’une aristocratie qui l’est tout autant fait justement de Bernanos ce penseur singulier qu’il serait ridicule de vouloir classer sur l’échiquier politique. Bernanos ne critiquait pas la démocratie en tant qu’idéal, mais sa réalité telle qu’il l’observait, où il discernait nettement « l’usurpation bourgeoise ». La démocratie et son jeu électoral notamment, ne sont « qu’une fiction politique au service d’intérêts économiques inavouables », chose que l’on serait bien culotté de vouloir lui contester à l’heur de la mondialisation. Si Bernanos rejettait le qualificatif de démocrate, c’est parce que « Le démocrate, et plus particulièrement l’intellectuel bourgeois démocrate, me paraît l’espèce de bourgeois la plus haïssable », ce qui n’est pas sans rappeler les attaques de Pasolini contre cette même bourgeoise de l’Argent qui vampirise le peuple pour le rendre aussi monstrueux qu’elle. Mais Bernanos, contrairement à Pasolini, analysait directement la répercussion de cette usurpation bourgeoise sur l’État, dont il assimilait la crise au profit des puissances financières et occultes ; « la dépossession progressive des États au profit des forces anonymes de l’Industrie et de la Banque ». Bernanos, ni ne gauche, ni de droite, rejettait le libéralisme qu’avait embrassé la bourgeoisie et qu’elle imposait par son hégémonie depuis la Révolution Française. Or, cela constitue dans la pensée de Bernanos une spoliation de tout, même de l’État, au profit d’un individualisme qui se traduit économiquement, là où la puissance publique était censée agir comme un rempart contre la prédation du capitalisme dérégulé. Voilà pourquoi Bernanos se moquait bien des clivages et du jeu politique ; comme il le dit dans La France contre les Robots : « ce sont les démocrates qui font les démocraties, c’est le citoyen qui fait la République ». C’est justement ce point-là qui le démarque de l’étiquette vulgaire que certains tenteraient lui accoler par excès de bien-pensance ; Bernanos, bien qu’attaché à la royauté, appréhendait totalement l’idéal républicain. Si, pour lui, il faut « se méfier des systèmes démocratiques modernes, si imparfaits, si sommaires, si mal défendus contre les trahisons de l’argent », c’est du fait des hommes politiques dont l’obédience ne va pas à la patrie, mais à l’Argent. Or, Bernanos clamait ouvertement dans Le lendemain, c’est vous qu’il n’a « jamais été républicain, mais [qu’il a] compri[t] maintenant ce que ce mot exprimait à tort ou à raison, pour des milliers d’hommes qui ont mis en lui leur foi et leur fierté ». Il ajoutera plus tard que « L’idéalisme de ce qu’on pouvait appelait jadis les masses républicaines, leur enthousiasme naïf pour la liberté, la justice, le progrès […], nous l’avons laissé tourner en dérision, faute immense ».
Si pour Bernanos, la démocratie est « probablement le mot le plus prostitué de toutes les langues », c’est à cause de sa mise en pratique par des hommes de pouvoir et opportunistes. Il relève ainsi dans une de ses lettres que les démocraties « font semblant de croire à ce qu’elles défendent, mais elles n’y croient pas. Au réalisme cynique des dictatures, elles n’opposent qu’un opportunisme hypocrite », allant jusqu’à consacrer « Saint Tartufe, patron des démocraties », dans Le Chemin de la Croix des Âmes. C’est pour cette raison qu’à son retour à Paris lors de la Libération, Bernanos remarqua que la France est retournée à un état proche de celui de 1789. La démocratie ne serait qu’une illusion, qui « après avoir signifié une conviction profonde, un état d’âme, une fois, le mot de démocrate ait pris peu à peu le sens de citoyen d’une démocratie, rien d’avantage, de sorte que nous sommes menacés de voir un jour des démocraties sans démocrates, des régimes libres sans hommes libres ». Mais n’en sommes-nous justement pas à ce point ? Ce que Bernanos s’échinait à démontrer n’était pas tant de savoir si la démocratie était mauvaise et faible dans son essence, au contraire puisqu’il l’estimait dans La France contre les Robots comme « un héritage sacré » où « justice et fraternité sont incluses », ajoutant même que « La démocratie est encore à faire », mais qu’elle a une propension plus forte que les autres régimes à succomber aux pouvoirs de l’Argent et de la Technique, car lorsqu’elle n’est que « la forme politique du capitalisme », elle « n’est pas plus la déclaration des droits de l’Homme que la dictature cléricale du général Franco n’est l’Évangile ». Cette usurpation bourgeoise n’est pas une expression vaine chez le penseur, car il fustigeait avec la même force l’idée d’une monarchie phagocytée par la bourgeoisie. Or, elle constitue le principal problème de régression sociale et culturelle selon Bernanos, de par l’acculturation du peuple qu’elle entraîne, mais aussi par l’absence totale de loyauté et de fidélité qui la caractérise. Bernanos notait d’ailleurs avec une certaine ironie que tout le monde se dit démocrate, « y compris le Führer et Mussolini », ou encore que « la bombe atomique est entrée dans l’histoire sous le signe des démocraties ». Autant de saillies qui devraient nous faire réfléchir sur l’absurde dimension messianique que nous donnons par occidentalisme au sens du mot « démocratie », alors qu’aujourd’hui, nous sommes plus que jamais dans ce que craignait Bernanos dans Le Chemin de la Croix des Âmes : « un système de slogans, comme un oiseau pris sous le faisceau d’un projecteur ».
« C’est le citoyen qui fait la République ; une démocratie sans démocrates, une république sans républicains, c’est la dictature de l’intrigue et de la corruption »
–Georges Bernanos, in « La France contre les Robots »–
En réalité, le régime idéal de Bernanos n’est guère éloigné de celui de Machiavel. Royaliste, certes, mais Bernanos rêvait d’un césarisme qui se souciât du peuple et fît avec lui bloc contre les puissances de l’Argent. Le sort des humbles est toujours ce qui distingua Bernanos du reste de l’Action Française ; avoir un roi pour avoir un roi ne l’intéressait pas si c’était pour revenir à l’Ancien Régime. La figure monarchique selon Bernanos devait être l’alliée des prolétaires, pas des sociétés anonymes ou des banques, fustigeant ceux qui lui prêtaient l’intention de professer « pour la personne des princes une espèce de fétichisme analogue à celui que certains dévots manifestent, en toute occasion, à l’égard du Saint-Père », à l’opposé d’un Charles Maurras par exemple.. Il écrivit ainsi que « « l’idée ne nous serait pas venue de nous rallier, au nom de l’ordre, avec ce vieux radical réactionnaire [Clémenceau, ndlr] contre les ouvriers français ». C’est toutefois désillusionné par la société moderne que Bernanos abjurât ses anciennes positions antirévolutionnaires, comprenant que le danger qu’apportèrent ces nouveaux obscurantismes que sont l’idéologie du progrès ou la modernité nécessitât un nouvel « élan national », dans la veine de 1789. Le prince n’est donc pour Bernanos « que le premier serviteur du peuple contre les puissantes oligarchies, hier les féodaux, à présent les trusts ». Ce qui le distingue de Pasolini réside en fait dans sa réflexion sur le rôle de l’État dans la lutte contre la civilisation des machines, estimant qu’il est le seul instrument capable de contenir la prédation de puissances occultes de cette « ère mécaniste et totalitaire » dans laquelle nous sombrons. Néanmoins, comme Pasolini, c’est au peuple que Bernanos tient, à ce peuple français qui savait résister contre l’usurpation bourgeoise, où qu’elle fût, et qui dorénavant est incapable de s’interroger sur les causes de sa propre misère. S’il eût vécu une décennie de plus, l’émergence des médias de masse ou de la télévision l’eut probablement terrifié, et alors qu’il pensait que seul « le peuple de la Résistance » aurait pu revivifier la Nation, peut-être aurait-il aussi rédigé un article sur la disparition des lucioles.
00:46 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : georges bernanos, littérature, littérature française, lettres, lettres françaises | |
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par Nicolas Bonnal
Ex: http://www.dedefensa.org
Un lecteur sympathique me demande bien gentiment comment résister à la matrice. Ma réponse est simple : couper sa télé, retirer l’argent de la banque, cultiver son jardin comme sa famille, faire des enfants, leur éviter l’école, bref se réconcilier avec la réalité de terrain, car elle existera toujours, sauf pour les Baudrillard qui regardent trop la télé. Le système ne doit pas être combattu ; il est assez grand pour ça, rappelle Philippe Grasset, il bouillonne dans son autodissolution imbécile. Il faut aussi maîtriser son accès au web et ne pas se laisser démoraliser par certains sites antisystèmes qui deviennent pires que le système. Pour le système la manipulation du catastrophisme (achetez de l’or, creusez un trou, et surtout préparez-vous à la guerre…) est excellente et décourage les braves gens ! Dans mes livres sur Tolkien j’ai souvent insisté sur le père de Sam le jardinier qui ignore le grand combat que lui explique mal son fils et cherche à protéger ses patates et ses salades. Car l’important est là.
Le monde change sans changer, et Voltaire nous avait tout dit dans son immortel et scolaire Candide, à l’issue d’un voyage mondialiste bien terrifiant (ceux qui se plaignent feraient bien de relire le conte et le récit de la vieille par exemple).
On écoute ce maître qui, disait Borges, écrit la plus belle prose du monde :
« Pendant cette conversation, la nouvelle s'était répandue qu'on venait d'étrangler à Constantinople deux vizirs du banc et le muphti, et qu'on avait empalé plusieurs de leurs amis. Cette catastrophe faisait partout un grand bruit pendant quelques heures. Pangloss, Candide et Martin, en retournant à la petite métairie, rencontrèrent un bon vieillard qui prenait le frais à sa porte sous un berceau d'orangers. Pangloss, qui était aussi curieux que raisonneur, lui demanda comment se nommait le muphti qu'on venait d'étrangler. »
Réponse de génie dans la simplicité :
« Je n'en sais rien, répondit le bonhomme, et je n'ai jamais su le nom d'aucun muphti ni d'aucun vizir. J'ignore absolument l'aventure dont vous me parlez ; je présume qu'en général ceux qui se mêlent des affaires publiques périssent quelquefois misérablement, et qu'ils le méritent ; mais je ne m'informe jamais de ce qu'on fait à Constantinople ; je me contente d'y envoyer vendre les fruits du jardin que je cultive. »
L’étendue de la terre importe peu. Ce qui importe c’est le travail familial :
« Vous devez avoir, dit Candide au Turc, une vaste et magnifique terre ? Je n'ai que vingt arpents, répondit le Turc ; je les cultive avec mes enfants ; le travail éloigne de nous trois grands maux : l'ennui, le vice, et le besoin. »
Il faut cultiver son jardin, ajoute Candide dans une phrase finalement peu comprise.
L’information industrielle abêtissante a toujours existé, voyez mon texte sur la rumeur (Fama) chez Ovide et Virgile. La Bruyère traduisant Théophraste, vieux disciple d’Aristote, écrit dans ses caractères :
« De là il se jette sur ce qui se débite au marché, sur la cherté du blé, sur le grand nombre d’étrangers qui sont dans la ville ; il dit qu’au printemps, où commencent les Bacchanales, la mer devient navigable ; qu’un peu de pluie serait utile aux biens de la terre, et ferait espérer une bonne récolte ; qu’il cultivera son champ l’année prochaine, et qu’il le mettra en valeur ; que le siècle est dur, et qu’on a bien de la peine à vivre. »
Le bon chrétien rajoutera à son jardin ces classiques et notre bon Cassien qui nous explique déjà comment résoudre nos problèmes psychologiques en temps de guerre ou de paix.
Voltaire – Candide
Cassien – Institutions
Bonnal – Les secrets de Cassien (Amazon.fr)
La Bruyère – Caractères
19:16 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, littérature française, lettres, lettres françaises, voltaire, 18ème siècle, candide | |
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par Nicolas Bonnal
Ex: http://www.dedefensa.org
Je ne les ouvre jamais mais depuis deux semaines les journaux en Espagne parlent très intelligemment de trois choses : la tyrannie de Poutine, qui n’en finira jamais (pauvre occident, que va-t-il faire, heureusement la bombe, heureusement l’OTAN, etc.) ; le changement climatique (il y a du vent et de la pluie, on est en mars…) et la grève féministe, qui permet de combattre enfin le nazisme masculin – on demande des budgets au gouvernement néocon local en ce sens.
Dans toutes ces histoires il ne s’agit que de racket.
On a évoqué le féminisme avec Nietzsche. On le relit :
« Il y a aujourd’hui, presque partout en Europe, une sensibilité et une irritabilité maladives pour la douleur et aussi une intempérance fâcheuse à se plaindre, une efféminisation qui voudrait se parer de religion et de fatras philosophique, pour se donner plus d’éclat — il y a un véritable culte de la douleur. »
Cette irritabilité se reflète-t-elle dans notre obsession pour les conditions météo ?
Sur le changement climatique je me demandais depuis combien de temps on s’abrutit ainsi ; car aucun classique ne nous emmerdait avec. Tout apparaît semble-t-il au milieu du dix-neuvième siècle : la guerre de Crimée crée la science météorologique, et Baudelaire se plaint de son ciel bas et lourd qui baisse comme un couvercle…
On connaît mon goût pour la cuisinière (une femme géniale, qui ne connaît ni Louis-Philippe, ni république, ni Badinguet) et la correspondance de Flaubert. Je recommande le début des années 1850, qui est prodigieux (voyez ses lettres à Victor Hugo). Sur une petite tempête météo voici ce qu’il écrit notre analyse littéraire de la femme moderne :
12 juillet 1853 – Tu auras appris par les journaux, sans doute, la soignée grêle qui est tombée sur Rouen et alentours samedi dernier.
Désastre général, récoltes manquées, tous les carreaux des bourgeois cassés ; il y en a ici pour une centaine de francs au moins, et les vitriers de Rouen ont de suite profité de l’occasion (on se les arrache, les vitriers) pour hausser leur marchandise de 30 p 100. Ô humanité ! C’était très drôle comme ça tombait, et ce qu’il y a eu de lamentations et de gueulades était fort aussi. Ç’a été une symphonie de jérémiades, pendant deux jours, à rendre sec comme un caillou le cœur le plus sensible ! On a cru à Rouen à la fin du monde (textuel). Il y a eu des scènes d’un grotesque démesuré, et l’autorité mêlée là-dedans !
M le préfet, etc. »
Oui, l’administration française avec ses préfets et notre inféodation a certainement joué dans cette formation du caractère geignard et assisté – plus de lois et de taxes, et d’amendes et de menaces, pour le féminisme et la lutte contre le racisme et pour le socialisme, et tout le reste…
Flaubert poursuit, coquin, comme James Kunstler ou Dimitri Orlov aujourd’hui :
« Ce n’est pas sans un certain plaisir que j’ai contemplé mes espaliers détruits, toutes mes fleurs hachées en morceaux, le potager sens dessus dessous.
En contemplant tous ces petits arrangements factices de l’homme que cinq minutes de la nature ont suffi pour bousculer, j’admirais le vrai ordre se rétablissant dans le faux ordre. Ces choses tourmentées par nous, arbres taillés, fleurs qui poussent où elles ne veulent (pas), légumes d’autres pays, ont eu dans cette rebuffade atmosphérique une sorte de revanche… »
Et il est content (Philippe Muray était euphorique au moment de la tempête du siècle en l’an 2000) :
« Ah ! ah ! cette nature sur le dos de laquelle on monte et qu’on exploite si impitoyablement, qu’on enlaidit avec tant d’aplomb, que l’on méprise par de si beaux discours, à quelles fantaisies peu utilitaires elle s’abandonne quand la tentation lui en prend ! Cela est bon. On croit un peu trop généralement que le soleil n’a d’autre but ici−bas que de faire pousser les choux.
Il faut replacer de temps à autres le bon Dieu sur son piédestal. Aussi se charge−t−il de nous le rappeler en nous envoyant par−ci par−là quelque peste, choléra, bouleversement inattendu et autres manifestations de la Règle, à savoir le Mal − contingent qui n’est peut−être pas le Bien − nécessaire, mais qui est l’être enfin : chose que les – hommes voués au néant comprennent peu. »
Et Flaubert un peu plus loin souligne ce qui accompagne cette jérémiade climatique, savoir le règne des machines et la montée de notre stupidité :
14 août 1853 – « La cloche du paquebot du Havre sonne avec tant d’acharnement que je m’interromps. Quel boucan l’industrie cause dans le monde ! Comme la machine est une chose tapageuse ! à propos de l’industrie, as-tu réfléchi quelquefois à la quantité de professions bêtes qu’elle engendre et à la masse de stupidité qui, à la longue, doit en provenir ? Ce serait une effrayante statistique à faire ! »
Flaubert est un génie et prévoit donc les effets du taylorisme soixante-dix avant Charlot (un autre génie) :
« Qu’attendre d’une population comme celle de Manchester, qui passe sa vie à faire des épingles ? Et la confection d’une épingle exige cinq à six spécialités différentes ! Le travail se subdivisant, il se fait donc, à côté des machines, quantité d’hommes−machines. Quelle fonction que celle de placeur à un chemin de fer ! de metteur en bande dans une imprimerie ! etc., etc. Oui, l’humanité tourne au bête. Leconte a raison ; il nous a formulé cela d’une façon que je n’oublierai jamais. Les rêveurs du moyen âge étaient d’autres hommes que les actifs des temps modernes. »
Ici ce serait du Guénon, du Chesterton, du Bernanos : « Les rêveurs du moyen âge étaient d’autres hommes que les actifs des temps modernes. »
On comprend que pour fuir cette connerie il se soit voué au culte de l’art, quand il était encore possible (car comment faire connaître un Flaubert aujourd’hui s’il en existait un ???) :
« L’humanité nous hait, nous ne la servons pas et nous la haïssons, car elle nous blesse. Aimons-nous donc en l’art, comme les mystiques s’aiment en Dieu, et que tout pâlisse devant cet amour ! »
Enfin Flaubert avait compris que notre fin de l’histoire, comme je le dis toujours, durerait des siècles :
Je comprends depuis un an cette vieille croyance en la fin du monde que l’on avait au moyen âge, lors des époques sombres. Où se tourner pour trouver quelque chose de propre ? De quelque côté qu’on pose les pieds on marche sur la merde. Nous allons encore descendre longtemps dans cette latrine. »
Car qui pensait qu’après Hollande détesté, la multitude élirait son ministre de l’économie ?
Tout cela donne raison à sa cuisinière décidément :
« J’ai eu aujourd’hui un grand enseignement donné par ma cuisinière. Cette fille, qui a vingt-cinq ans et est Française, ne savait pas que Louis-Philippe n’était plus roi de France, qu’il y avait eu une république, etc. Tout cela ne l’intéresse pas (textuel). Et je me regarde comme un homme intelligent ! Mais je ne suis qu’un triple imbécile. C’est comme cette femme qu’il faut être. »
Sauf qu’aujourd’hui la brave fille serait abrutie par son smartphone et sa télé…
Nicolas Bonnal – Chroniques sur la fin de l’histoire
Flaubert – Correspondance, 1850-1854 (ebookslib.com)
Nietzsche – Par-delà le bien et le mal
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Bulletin célinien n°405
Sommaire :
- Lucette, entre toutes les femmes
– Céline et le Comité de Prévoyance et d’Action sociale
– Misère de la condition humaine chez Céline
– Galtier-Boissière
– Céline à Leningrad
Faut-il que la gloire posthume de Céline insupporte certains ! Dans un roman aussi pesant que touffu, Maxime Benoît-Jeannin raconte les liens professionnels et privés qui unirent, sous l’Occupation, deux personnalités aussi affirmées que Dominique Rolin et Jeanne Loviton à Robert Denoël. Céline, son auteur fétiche, apparaît à plusieurs reprises. Paranoïaque, veule et bien entendu partisan de l’extermination de la race élue ¹, c’est ainsi que ce romancier le dépeint sans nuance. En revanche, il a pour Sartre les yeux de Chimène, se gardant bien de rappeler que celui-ci se compromit avec un autre totalitarisme ². Et de dénoncer dans l’épilogue « un Sartre bashing frénétique qui touche tous les milieux » ainsi que « cette haine pathologique pour le philosophe français le plus important depuis Descartes [sic] ». Pour en arriver à déplorer que « du coup, la commémoration du centenaire de sa naissance se fit a minima. » La phrase qui suit est édifiante à souhait : « Parallèlement, la gloire de Céline monte encore en puissance, son lectorat ne cesse de grandir. » …Voilà qui est assurément insupportable.
Quant à ce roman, gageons qu’il découragera plus d’un lecteur s’intéressant à cette période. Tant de personnages défilent qu’on ne parvient à s’attacher à aucun d’entre eux. On a en outre l’impression que l’auteur a voulu y fourguer toute sa documentation. Elle est d’autant plus vaste qu’il l’a largement puisée sur un site internet en libre accès: celui qu’Henri Thyssens consacre depuis 2005 à Robert Denoël. Mais on est loin de l’élégance d’un Pierre Assouline qui, à la fin de son roman Sigmaringen, tint à citer ses sources. Le travail de Thyssens est ici sommairement mentionné au détour d’une page alors que, sans les recherches qu’il a accumulées pendant vingt ans, ce roman n’existerait tout simplement pas. Quant au chercheur il est qualifié d’« admirateur de Louis-Ferdinand Céline », ce qui, dans l’esprit de l’auteur, doit être un tantinet suspect.
Dans la presse Benoît-Jeannin se défend d’être manichéen mais le lecteur constate qu’il n’a que profond mépris pour tous les écrivains qui se sont engagés dans la voie de la Collaboration. C’est dire si l’on s’écarte du jugement d’un Malraux qui considérait Drieu comme « l’un des êtres les plus nobles qu’[il ait] rencontrés ». Ici, tous ceux qui étaient dans le mauvais camp sont jugés à l’aune de la même toise. C’est tellement plus simple ainsi.
Reste l’énigme du meurtre de Robert Denoël. L’auteur y voit la conséquence d’une altercation qui aurait mal tourné entre un résistant revenu des camps et Denoël qui lui aurait demandé son appui pour le procès dont il était menacé. Hypothèse qui paraît un peu alambiquée. Une seule chose est sûre : on n’a pas fini de gloser sur cette affaire vieille de plus d’un demi-siècle.
• Maxime BENOÎT-JEANNIN, Brouillards de guerre (roman), Éditions Samsa, 2017, 500 p. (26 €)
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Franck Buleux
Ex: https://metamag.fr
L’intérêt essentiel de cet essai est de souligner le fait, pour Drieu la Rochelle, de ne pas se satisfaire, comme les nationalistes français, de la victoire sur l’Allemagne lors de la Première Guerre mondiale, qui s’est soldée par le Diktat de Versailles, en 1919. Au-delà de l’Europe exsangue, meurtrie par cette guerre civile européenne, Drieu la Rochelle nous propose une Europe digne de son passé, qui retrouve son Imperium.
L’expression « mesure » était faite pour choquer. Qui oserait « mesurer » la France éternelle, présente sur les cinq continents ? Le Normand Drieu la Rochelle rêve d’Empire mais a conscience de la faiblesse démographique française. Visionnaire lorsque l’auteur exprime cette nécessité d’union continentale, cet essai mérite d’être lu parce qu’il annonce (prématurément ? à tort ?) la fin des nations, alors que brille encore dans les yeux des Français, la victoire en trompe l’œil, selon l’auteur, de 1918. Une victoire certes, mais à quel prix ? Au prix d’une population dévastée sur un territoire, devenu un champ de bataille et de ruine, une Europe exsangue soumise à des traités qui, loin d’en satisfaire les parties, la renvoient vers d’autres interminables et sanglants conflits. Mais qui s’en soucie, en 1922 ?
C’est dans l’euphorie générale de la victoire, dans la germanophobie ambiante, que Drieu la Rochelle en appelle au dépassement de la notion de patrie. Sans nier cette réalité, « l’ère des patries n’est pas close » tient-il à préciser d’emblée, il ouvre l’avenir européen à celui des alliances entre États. Il constate notre faible démographie déjà, parle de « suicide » et ouvre les yeux, lucide, face à des mondes qui nous entourent, ces « énormes morceaux » d’Amérique et d’Asie, lire les États-Unis et l’Union soviétique. Supputant la fin des colonies, Drieu la Rochelle ne peut se représenter la France que dans le cadre d’une alliance continentale. Il évoque, en les appelant de ses vœux, ces futures unions entre patries comme ayant une « physionomie propre », qui « mêleront les traits des États »… Vaste débat qui sera largement repris lors de la construction européenne dans les années 1950, et bien au-delà.
Face à l’euphorie de l’éphémère victoire, cette alliance européenne (car il s’agit bien de cela) est une « question de vie ou de mort », selon l’auteur lui-même : ne pas aller vers cette union nous entraînerait inéluctablement et irrésistiblement vers d’autres conflits. Intégrer l’Allemagne, contre laquelle la France vient de combattre, avant que celle-ci ne se tourne vers d’autres alliances, plus à l’Est. N’oublions pas que l’Union soviétique est en train de se construire, à l’intérieur, comme une véritable fortification socialiste (et un modèle pour beaucoup !) et qu’en serait-il de nous, Français, si l’Europe centrale (Mitteleuropa) se tournait vers elle ? L’insularité britannique et la défaite allemande ne sont-ils pas des risques de division du Vieux Continent ? La perfide Albion tournée vers l’Amérique et l’Allemagne, humiliée par le traité de Versailles, lorgnant vers l’Empire communiste… Dans cette saisissante hypothèse, que resterait-il de la France éternelle ?
Anticipant les travaux de Carl Schmitt sur la distinction entre puissance maritime et puissance terrestre, Drieu la Rochelle rappelle le positionnement géographique central de l’Allemagne, qu’il situe « en pleine terre, en plein Europe ». En développant cet aspect d’union continentale, Drieu la Rochelle rêve de cet empire romain germanique disparu qui mobiliserait la jeunesse européenne.
Mais Drieu la Rochelle demeure d’un tempérament pessimiste. Il condamne les Français, en les dépeignant comme « résignés », s’attachant à une armée nationale alors que des transformations commencent à poindre à l’horizon du monde. C’est résolument vers l’Allemagne qu’il faut nous tourner, pense l’auteur, pour fonder l’Europe unique qu’il appelle de ses vœux et dont il aimerait voir la France fer de lance.
À défaut, Drieu la Rochelle, en visionnaire éclairé, s’interroge sur la Russie naissante qui se dresse « dans sa steppe » et « dont le mystère semblait plein de promesses ». La jeunesse du prolétariat russe préfigurerait-t-elle l’avenir ? S’interroge l’auteur, observant cette montée en puissance de l’Est face à l’Amérique, grand vainqueur économique du premier conflit mondial.
Pourtant, Drieu la Rochelle rejette ce qu’il appelle le parti de la Production, c’est-à-dire le parti de l’argent, celui qui domine l’Amérique mais il retrouve, dans le bolchevisme, cette même idée fondée sur le matérialisme, comme unique ressort de l’humanité.
Née sous les cendres de la Première Guerre mondiale, la Société des nations (SDN) semble préfigure, pour Drieu la Rochelle, une avancée vers cette union européenne face aux dangers qui s’annoncent. Il développera cette idée, lui “Le jeune Européen” (texte paru en 1927), dans” Genève ou Moscou”, paru en 1928. Ce choix, que l’on pressent déjà dans” Mesure de la Franc”e, ce choix « central » de l’Europe permettrait de résister aux deux impérialismes qui s’annoncent. Il entrevoit Genève (rappelons-le, c’est dans cette ville que siège, à l’époque, la SDN) comme capitale, pour résister d’abord à l’impérialisme américain (Les États-Unis ont refusé d’intégrer la SDN). Le second rempart possible contre l’hégémonie américaine serait le communisme, représenté par Moscou. Or, le rempart communiste ne représente qu’un simulacre, « l’ombre du capitalisme », symbolisant pour Drieu le triomphe de la Production et, au terme, celui de la mort. « Il faut faire l’Europe parce qu’il faut respirer quand on ne veut pas mourir. Il faut faire l’Europe à moins qu’on ne soit bolchevik d’extrême droite ou d’extrême gauche, à moins qu’on ne veuille laisser un grand bûcher s’amonceler sur lequel flambera, avant vingt ans, toute la civilisation, tout l’espoir, tout l’honneur humain. ». Dans les années vingt, si Drieu La Rochelle était encore hésitant sur sa voie politique, fréquentant les surréalistes et l’Action française, l’approche des années trente le fait sortir de sa réserve en choisissant l’Europe et martèle-t-il inexorablement face au monde, encore incrédule : « Si la capitale politique et économique des États-Unis d’Europe ne se fait pas, si Genève ne se fait pas, Moscou se fera.»
Ainsi, “Mesure de la France” préfigure d’autres écrits, considérés comme majeurs, de Drieu la Rochelle. Cet essai de 1922 annonce aussi son choix de l’Allemagne, non par idéologie, mais par qu’elle lui semble, à une époque incertaine, le meilleur rempart contre les impérialismes et le meilleur allié pour espérer, au-delà de la France seule, donner à l’Europe une place dans l’Histoire, celle qui lui revient.
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1913 : la France cède aux « douces romances » du pacifisme. Sous l’influence de l’intelligentsia parisienne, la jeunesse française se désintéresse de la guerre et des soldats. Contre le parti des intellectuels, Ernest Psichari, un jeune officier d’artillerie coloniale, publie son deuxième roman, un roman à thèse, dont le mot d’ordre est le « militarisme intégral ». Achevé sous la tente saharienne, L’appel des armes (1913) célèbre la figure du soldat, la beauté de l’action et de la force. Par le service des armes, il redevient possible de mener dans le monde une vie de grand style.
« Lorsque l’auteur de ce récit fit ses premières armes au service de la France, il lui sembla qu’il commençait une vie nouvelle. Il eut vraiment le sentiment de quitter la laideur du monde et d’accomplir comme la première étape d’une route qui devait le conduire vers de plus pures grandeurs. » Engagé à 20 ans, Ernest Psichari quitte avec enthousiasme la maison paternelle. Ce jeune intellectuel, petit-fils d’Ernest Renan, trouve dans la vie militaire une délivrance de la vie ordinaire qu’il mène à Paris. Admis dans l’artillerie coloniale, Psichari découvre la joie de l’action, et consacre près de cinq années de sa vie à l’Afrique. Au cours d’un « magnifique exil » en Mauritanie, il rédige L’appel des armes, un roman d’apprentissage dont la trame n’est pas sans rappeler le parcours du jeune écrivain.
Le héros de ce roman, Maurice Vincent, est un adolescent, fils d’un instituteur antimilitariste. Au contact de Timothée Nangès, capitaine dans l’artillerie coloniale, il trouve dans son cœur une vocation de soldat. Prenant « contre son père le parti de ses pères », il choisit le parti des hommes d’action et s’engage comme simple canonnier. Contre son père biologique, il se réfère désormais à une autre paternité, spirituelle, incarnée par ce soldat de l’armée coloniale. Les rapports entre les deux hommes sont désormais ceux de maître à disciple, d’initiateur à initié. L’adolescent embrasse une vie entièrement nouvelle, qui s’apparente à une seconde naissance.
Selon Psichari, les soldats sont les derniers représentants d’une idée, l’incarnation de l’action et de la force. À l’abri de toute compromission, de toute faiblesse, l’armée est le dernier rempart de la nation. Quelque direction que prenne le monde, il ne se passera pas des armes. Psichari rejoint en cela son ami Charles Péguy : « Que la Sorbonne le veuille ou non, c’est le soldat français qui lui mesure la terre. […] C’est le soldat français qui fait qu’on parle français à Paris » (L’Argent). Pour la nouvelle génération, l’armée est la meilleure école. Elle est l’héritière de la « grande œuvre romaine et française », le seul moyen d’échapper à son siècle et la société moderne. Elle est également l’objet d’un véritable mystique : sa mission est de « racheter la France par le sang ». Contre l’humanitarisme, contre le pacifisme, l’armée incarne la France éternelle, « fille aînée de la Gloire », « toujours guerrière et aventureuse », « toujours prête à se lancer dans une généreuse aventure […] s’il est de la gloire à glaner ».
Le jeune Maurice Vincent cultive des « pensées de gloire ». Il rêve de pays lointains, de champs de bataille ensoleillés. « Son foyer, désormais, serait une tente errante parmi les déserts roses des Tropiques. » Son modèle, le capitaine Nangès, est une force vive, un homme tendu vers l’action, une authentique figure de guerrier. Celui-ci se charge de son éducation, lui enseigne un idéal. En parallèle de son instruction militaire, l’adolescent recueille l’instruction spirituelle du capitaine. L’enfant soldat s’éveille au « militarisme intégral ».
L’annonce de son départ pour la Mauritanie est « la plus belle heure de sa vie », le point culminant de son destin. L’Afrique est une « terre d’action », la seule qui permette à son pays d’inscrire quelques pages de gloire dans l’histoire médiocre de son temps. Le principal danger, c’est « d’oublier l’histoire », de perdre le sens de celle-ci. « Nous nous préparons des années d’histoire vide. Pensez-vous à ce que pourront dire plus tard de nous les historiens ? Nos enfants verront dans leur manuel : ‘‘De 1880 à 19.., le commerce et l’industrie prospérèrent’’. À quoi servons-nous, sinon à faire l’histoire, et si nous ne la faisons pas, qui la fera ? »
L’appel de la tradition
Héritière d’un passé glorieux, véritable incarnation de l’ordre, l’armée est la seule, avec l’Église, qui ait maintenu une tradition : « L’armée représente une grande force du passé, la seule, avec l’Église, qui reste vierge, non souillée, non décolorée par l’impureté nouvelle. » Le rôle du soldat, c’est donc de maintenir un certain « fonds moral », qui s’oppose au pacifisme, à l’humanitarisme, aux rêveries infécondes de son siècle. Le parti des intellectuels est représenté par le père biologique de Maurice, un « sophiste », une « âme tiède » maudissant les soldats et leur drapeau. Paradoxalement, Maurice est un représentant du passé, d’un passé héroïque – son père, un représentant de l’avenir, du parti des intellectuels, grands selon l’esprit, mais non selon le cœur. Maurice est désormais « un bel enfant barbare, dans un monde jeune ».
En rêve, le capitaine Nangès rencontre Timoléon d’Arc, un personnage de Servitude et grandeur militaires (1835) de Vigny. Le héros de Vigny envie le héros de Psichari. Il aurait aimé fouler en conquérant cette terre d’Afrique, pleine de charme et de volupté. Là, l’homme se purifie, s’épure, loin des « pourritures modernes ». Là, du moins, « quelque idéal reste encore ». En réponse, le capitaine Nangès évoque le mépris de la nation, le rejet du colonialisme. La métropole tient les glorieuses chevauchées des soldats en piètre estime. « Le bourgeois a la crainte de ce qu’il ne comprend pas. Il tremble aux mots d’infini, d’absolu. Le Sahara lui fait peur, comme la musique de Wagner. » Comme Ernst Jünger le décrira quelques années plus tard : « L’élémentaire réside en dehors de son monde idéal ; pour lui, l’élémentaire est l’irrationnel voire l’immoral. »
Au contraire, « la guerre est divine ». Dans Terres de soleil et de sommeil (1908), Ernest Psichari décrivait la guerre comme un « indicible poème de sang et de beauté ». Elle est « la plus voisine des puissances cachées qui nous mènent » et le capitaine Nangès ne regrette pas que le jeune Maurice ait éprouvé cela : « Heureux les jeunes hommes qui, de nos jours, ont mené la vie frugale, simple et chaste des guerriers ! […] Toutes les terres sont belles pour un jeune soldat. Toutes les aubes sont fraîches, naïves ; puisqu’on s’y lève joyeux, confiant dans sa force, audacieux. » Dans cette terre d’Afrique, terre de soldats, imprégnée de grandeur et de noblesse, le capitaine Nangès entend son métier « en artiste ». Et Psichari de citer Alfred de Vigny : « Il exerce, non en ambitieux, mais en artiste, l’art de la guerre. » Ernst von Salomon, reprendra cette image dans Les Cadets (1933) : « Les soldats sont des artistes et les grands maîtres de la guerre sont le cœur mystique du monde. »
Témoignage d’une génération, L’appel des armes rencontre en 1913 un succès notable. La conversion de Psichari au catholicisme la même année achève d’en faire un modèle à la jeunesse de France. Il connaîtra néanmoins une destinée tragique. Comme Charles Péguy, dont il fut le « disciple préféré », Ernest Psichari est rappelé à Dieu au cours des premières semaines de la Grande Guerre. Mort à 30 ans le 22 août 1914 à la tête de ses hommes, le lieutenant Psichari devient l’un des héros de la « génération sacrifiée ».
14:09 Publié dans Littérature, Militaria | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ernest psichari, première guerre mondiale, guerre, littérature, littérature française, lettres, lettres françaises | |
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01:16 Publié dans Jean Parvulesco, Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean parvulesco, laurent james, poésie, japon, littérature, lettres, lettres françaises, littérature française | |
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18:25 Publié dans Cinéma, Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : céline, louis-ferdinand céline, lettres, lettres françaises, littérature, littérature française, cinéma, 7ème art | |
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Bulletin célinien n°404 (février 2018)
Sommaire :
Une réédition censurée
Ce qu’en pense la traductrice israélienne de Céline
Ce qu’en pense Marc-Édouard Nabe
Polémique pour une autre fois
Rééditer les pamphlets ? C’est déjà fait !
Céline sur les planches.
Tout se serait donc passé autrement si le projet n’avait pas été ébruité. Il aurait fallu simplement veiller à ce qu’il n’y ait aucune fuite. Un fort volume serait sorti dans les “Cahiers de la Nrf” ou dans une autre collection et les opposants eussent été mis devant le fait accompli. Au lieu de cela les groupes de pression ont largement eu le temps de s’organiser, de se concerter et finalement d’empêcher que ce projet éditorial aboutisse. Cette affaire a permis, par ailleurs, d’observer de multiples divisions. Ainsi, au sein du CRIF, plusieurs militants étaient partisans d’une réédition encadrée par un collectif d’historiens alors que le président de cette organisation, après avoir hésité, s’est finalement rallié à la position de Klarsfeld.
Les historiens eux-mêmes n’étaient pas d’accord entre eux : Taguieff fit circuler un appel favorable à une réédition contrôlée par eux (appel signé notamment par Laurent Joly, Grégoire Kaufmann, Annette Becker et Odile Roynette) alors qu’un autre collectif d’historiens (Alya Aglan, Tal Bruttman, Éric Fournier, André Loez) se déclarait, lui, partisan de l’interdiction. Du côté politique, même chose: si le Premier Ministre était pour, plusieurs députés (Alexis Corbière mais aussi plusieurs élus de la majorité) étaient hostiles. Même division dans le milieu littéraire : les uns (Moix, Sansal, Jourde, Millet et Maulin) estimaient cette édition utile, alors que les autres (Modiano, Angot, Ernaux et même Vitoux) y étaient opposés. Une fois encore, Céline a suscité post-mortem un joli barouf, ce qui est somme toute très célinien.
Un esprit libre comme Philippe Bilger a su poser le problème en termes pertinents : « Derrière ces joutes aussi bien intellectuelles que politiques, prônant l’emprise d’un passé tragique sur le présent ou un présent libre mais non oublieux, il y a toujours la même hantise, la même crainte, presque le même mépris. À quel titre prétend-on se mêler de ce qui regarde le citoyen, le lecteur, de son choix et de son intelligence ? (…) N’aurait-il pas été concevable, convenable de rééditer ces textes et de laisser tous ceux qui admirent Céline pour partie ou pour le tout, qui le détestent pour le tout ou pour partie ou qui sont tout simplement curieux de l’ensemble se forger leur opinion, élaborer leur conviction et prendre un parti ? Faut-il donc toujours les prévenir, les alerter, les dissuader, leur enjoindre, les priver AVANT au lieu de les laisser lire, vivre ? » ¹. On peut raisonnablement penser que les lecteurs du Bulletin partagent cette opinion.
00:29 Publié dans Littérature, Revue | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : céline, pamphlets céliniens, revue, littérature, littérature française, années 30, lettres, lettres françaises | |
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par Nicolas Bonnal
Ex: http://www.dedefensa.org
Fatigué des nouvelles du jour, je me remets à glaner dans tout Montaigne. Sur nos guerres protestantes, américaines, notre choc des civilisations, j’y trouve ceci :
«… je trouve mauvais ce que je vois en usage aujourd’hui, c’est-à-dire de chercher à affermir et imposer notre religion par la prospérité de nos entreprises.
Notre foi a suffisamment d’autres fondements pour qu’il ne soit pas nécessaire de fonder son autorité sur les événements. Car il y a danger quand le peuple, habitué à ces arguments plausibles et bien de son goût, voit sa foi ébranlée par des événements qui lui sont contraires et défavorables. Ainsi en est-il des guerres de religion dans lesquelles nous sommes plongés. »
Sur la société d’abondance et de consommation qui produit satiété et dépression, j’y trouve cela :
« Pensons-nous que les enfants de chœur prennent vraiment du plaisir à la musique ? La satiété la leur rend plutôt ennuyeuse. Les festins, les danses, les mascarades, les tournois réjouissent ceux qui ne les voient pas souvent, et qui désirent depuis longtemps les voir ; mais pour celui dont ils forment l’ordinaire, le goût en devient fade et même déplaisant : les femmes n’excitent plus celui qui en jouit autant qu’il veut… Celui qui n’a pas l’occasion d’avoir soif ne saurait avoir grand plaisir à boire. »
Montaigne ajoute, comme s’il pensait à nos comiques :
“Les farces des bateleurs nous amusent, mais pour eux, c’est une vraie corvée. »
La société d’abondance ? Il la définit ainsi Montaigne :
« Il n’est rien de si ennuyeux, d’aussi écœurant que l’abondance. Quel désir ne s’émousserait d’avoir trois cent femmes à sa disposition, comme le Grand Turc dans son sérail ?
Quel désir et quelle sorte de chasse pouvait bien avoir celui de ses ancêtres qui n’y allait jamais qu’avec au moins sept mille fauconniers ? »
Sur l’espionnage par l’Etat profond, Montaigne nous rappelle tout simplement que les Grands sont plus espionnés que les petits, mais qu’ils y ont pris goût (pensez à son pessimiste ami La Boétie):
« Tout le monde redoute d’être contrôlé et épié ; les grands le sont jusque dans leurs comportements et leurs pensées, le peuple estimant avoir le droit d’en juger et intérêt à le faire. »
Pensons au harcèlement de nos pauvres peoples. A son époque c’est pire :
« Et il ne m’est jamais venu à l’idée que cela puisse constituer un quelconque avantage, dans la vie d’un homme cultivé, que d’avoir une vingtaine d’observateurs quand il est sur sa chaise percée… »
Deux siècles avant Montesquieu, Montaigne dénonce les caprices de la mode :
« La façon dont nos lois tentent de régler les folles et vaines dépenses de table et de vêtements semble avoir un effet contraire à son objet. Le vrai moyen, ce serait de susciter chez les hommes le mépris de l’or et de la soie, considérés comme des choses vaines et inutiles. Au lieu de cela, nous en augmentons la considération et la valeur qu’on leur attache, ce qui est bien une façon stupide de procéder si l’on veut en dégoûter les gens. »
La mode va vite comme la télé (cf. Virgile-Ovide) :
« Il est étonnant de voir comment la coutume, dans ces choses de peu d’importance, impose si facilement et si vite son autorité. À peine avions-nous porté du drap pendant un an à la cour, pour le deuil du roi Henri II, que déjà dans l’opinion de tous, la soie était devenue si vulgaire, que si l’on en voyait quelqu’un vêtu, on le prenait aussitôt pour un bourgeois. »
La Fontaine dira que le courtisan est un ressort. Montaigne :
« Le reste de la France prend pour règle celle de la cour.
Que les rois renoncent à cette vilaine pièce de vêtement qui montre si ostensiblement nos membres intimes, à ce balourd grossissement des pourpoints qui nous fait si différents de ce que nous sommes et si incommode pour s’armer, à ces longues tresses efféminées de cheveux… »
Montaigne vit au présent perpétuel, les ridicules qu’ils dénoncent sont donc ceux de la cité grecque d’Alan Bloom et Platon :
« Dans ses Lois, Platon estime que rien n’est plus dommageable à sa cité que de permettre à la jeunesse de changer ses accoutrements, ses gestes, ses danses, ses exercices et ses chansons, en passant d’une mode à l’autre, adoptant tantôt tel jugement, tantôt tel autre, et de courir après les nouveautés, adulant leurs inventeurs. C’est ainsi en effet que les mœurs se corrompent, et que les anciennes institutions se voient dédaignées, voire méprisées. »
Oui, il n’est pas trop réformateur, Montaigne.
Parfois il divague gentiment et il nous fait rêver avec ce qu’il a lu dans sa bibliothèque digne de Borges (voyez Guénon, Règne de la Quantité, les limites de l’histoire et de la géographie) :
« On lit dans Hérodote qu’il y a des peuples chez qui les hommes dorment et veillent par demi années. Et ceux qui ont écrit la vie du sage Épiménide disent qu’il dormit cinquante-sept ans de suite. »
Bon catholique, homme raisonnable surtout, Montaigne tape sur la Réforme, rappelant que deux siècles avant la révolution on a voulu changer les noms :
« La postérité ne dira pas que notre Réforme d’aujourd’hui a été subtile et judicieuse ; car elle n’a pas seulement combattu les erreurs et les vices, et rempli le monde de dévotion, d’humilité, d’obéissance, de paix et de toutes les vertus. Elle est aussi allée jusqu’à combattre ces anciens noms de baptême tels que Charles, Louis, François, pour peupler le monde de Mathusalem, Ézéchiel, Malachie, supposés plus imprégnés par la foi ! »
Sur ce sujet lisez son disciple Rothbard et son texte sur l’idéal communisme-millénariste des protestants, en particulier des anabaptistes.
Lire Montaigne (il dénonce le rustre son temps et sa mode efféminées !), qui nourrit Pascal, Cervantès et Shakespeare, c’est retomber dans l’enfance de la sagesse de la grande civilisation européenne aujourd’hui engloutie. Une sagesse biblique un rien sceptique, héritée de Salomon, plus sympathique que celle du sinistre Francis Bacon, qui triompha avec son Atlantide scientiste et son collège d’experts en folles manipulations psychologiques, génétiques et même agronomiques (lisez-le pour ne pas rire). Montaigne a moins voulu nous prévenir contre la tradition que contre cette folle quantité de coutumes, de modes et de snobismes qui s’imposeraient dans notre monde moderne déraciné.
On le laisse nous remettre chrétiennement à notre place (apologie de Raymond Sebond) :
« Le moyen que j’utilise pour combattre cette frénésie, celui qui me semble le plus propre à cela, c’est de froisser et fouler aux pieds l’orgueil et la fierté humaine. Il faut faire sentir à ces gens-là l’inanité, la vanité, et le néant de l’homme, leur arracher des mains les faibles armes de la raison, leur faire courber la tête et mordre la poussière sous le poids de l’autorité et du respect de la majesté divine. Car c’est à elle, et à elle seule qu’appartiennent la connaissance et la sagesse… »
Voilà pour le paganisme aseptisé de nos couillons de nos manuels scolaires !
Ou bien (Essais, I, L) :
« Je ne pense pas qu’il y ait en nous autant de malheur que de frivolité, autant de méchanceté que de bêtise ; nous sommes moins remplis de mal que d’inanité, nous sommes moins malheureux que vils. »
A transmettre à Davos. Et comme on parlait du roi Salomon, on citera ses proverbes :
« La gloire de Dieu est de cacher une chose, et la gloire des rois est de sonder une chose. »
Enfin pour faire lire et relire Montaigne je prends plaisir à recommander l’édition-traduction de Guy de Pernon, que j’ai trouvée juteuse et agréable, presque autant que le légendaire texte original (ebooksgratuits.com).
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par Bruno Lafourcade
Ex: https://ladecadencedecordicopolis.com
Trouvé sur Délit d’images à propos de Louis Pauwels qui sut défrayer les chroniques en son temps en étant l’auteur de cinglantes et impitoyables volées de bois contre le monde moderne et ses enfants atteints de « sida mental »…
Il s’agit d’un article de Bruno Lafourcade de Boulevard Voltaire.
Merci pour ce rafraîchissement !
« Il y a vingt ans que Louis Pauwels est mort. Ce nom ne dit peut-être rien aux jeunes gens d’aujourd’hui ; il disait beaucoup à ceux des années quatre-vingt – ils manifestaient contre « la loi Devaquet », les anciens de 68 les brossaient dans le sens du duvet et Pauwels, lui, « n’ayant pas de minus à courtiser », leur dit virilement qui ils étaient : « les enfants du rock débile, les écoliers de la vulgarité pédagogique, les béats de Coluche et Renaud nourris de soupe infra-idéologique cuite au show-biz, ahuris par les saturnales de “touche pas à mon pote”, et, somme toute, les produits de la culture Lang ». La suite de ce « Monôme des zombies », publié le 6 décembre 1986 dans Le Figaro Magazine, n’était pas moins fouetteur : « Ils ont reçu une imprégnation morale qui leur fait prendre le bas pour le haut. Rien ne leur paraît meilleur que n’être rien, mais tous ensemble, pour n’aller nulle part. […] C’est une jeunesse atteinte d’un sida mental. »
Cette expression en scandalisa beaucoup, en effraya certains, en secoua d’autres, arrachés à leur sommeil dogmatique, qui comprirent d’un seul coup que son auteur, à la vigueur imagée et frontale, avait raison : le style n’a jamais tort. Pauwels, dans cet article prémonitoire, arrachait de leur chemise la petite main jaune de la bonne conscience que les mitterrandiens y avaient épinglée.
Bien entendu, laisser un article, quand on en a écrit des milliers, c’est peu ; une expression, c’est moins encore, quand on est romancier ; c’est pourtant ce qui est arrivé à Pauwels, que ce « sida mental » résume, sans le déformer – qui exprime exactement sa phrase et sa morale également robustes.
À la tête de Combat à vingt-neuf ans, Pauwels fondera, plus tard, Le Figaro Magazine, où il fit entrer l’équipe de la Nouvelle Droite, avant de s’en séparer. Il s’est aussi intéressé à l’ésotérisme, écrivit avec Jacques Bergier Le Matin des magiciens, dont le succès sera suivi par la revue Planète. Il a été, enfin, un romancier très imprégné par le « réalisme fantastique », sauf pour son dernier roman, Les Orphelins, qui offre curieusement un écho à son plus célèbre article, publié dix ans plus tôt.
Nous sommes peu après Mai 68 ; Michel Cartry, un jeune gauchiste, voue à son père, Antoine, un riche industriel, une haine qui le conduit à accepter de feindre d’avoir été enlevé par les Brigades rouges : il s’agit d’obtenir une rançon. Pauwels en profite pour traduire Mai 68 en justice (« Comment tant de gens intelligents ont-ils consenti à voir un Messie dans cette jeunesse devenue folle qui brûlait sa maison afin de l’éclairer ? »), avec la génération qui, vingt ans plus tard, s’amuserait à en faire descendre d’autres dans la rue (« Michel, dit son père, aurait pu devenir un jeune homme. L’époque l’a réduit à l’état vaseux et acide des “jeunes”. Les “jeunes” : des grégaires qui se prétendent singuliers ; qui se croient naturels parce qu’ils sont informes » ; d’ailleurs, « pour ceux qui ne valent pas grand-chose, comme Michel, c’est un réconfort de crier que rien ne vaut »).
Vif et vigoureux, jamais alourdi par l’empathie, Pauwels aurait eu assez de dons, d’intuition et de jugement (« C’est deux fois vieillir que vieillir dans la laideur ») pour être le grand romancier des mœurs de son temps ; il a préféré en être le reporter. Il n’est pas exagéré de dire qu’il ne fut pas indigne de sa mission. ».
Tout est tellement vrai et bien vu ! Avec un franc-parler au style impeccable… un vrai plaisir.
Nous pouvons constater qu’aujourd’hui, les enfants du rock débile se sont perpétués en donnant naissance à une flopée d’enfants d’une techno débile, des immondes parades et du téléphone portable abêtissant.
Pauvre France…
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par Fares Gillon
Ex: https://www.philitt.fr
[Cet article est initialement paru dans la revue PHILITT #5 consacrée à la barbarie]
Dans Le Rivage des Syrtes, Julien Gracq prend le contre-pied d’une conception exclusivement négative de la barbarie en la présentant comme un renouveau nécessaire à la revivification d’un vieil État somnolent.
Le Rivage des Syrtes met en scène une vieille cité fictive, Orsenna, qui jouit tranquillement de sa paix, dans la sérénité des cimetières. Autrefois, une guerre l’avait opposée à un monde de l’autre côté de la mer, le Farghestan, civilisation en forme de « mosaïque barbare où le raffinement extrême de l’Orient côtoie la sauvagerie des nomades ». Après quelques escarmouches, « les hostilités languirent et s’éteignirent d’elles-mêmes tout à fait ». Selon un accord tacite, toutes les relations furent coupées, la mer devint une frontière infranchissable, et chacun vécut de son côté comme si l’autre n’existait plus. Durant trois siècles, Orsenna s’est enfoncée dans sommeil sans heurts. Le jeune héros, Aldo, s’ennuie d’une vie de plaisirs mondains et se fait envoyer comme fonctionnaire à l’Amirauté, port censément militaire sur le rivage de la région des Syrtes, qui fait face à l’ennemi tricentenaire, invisible et inconnu. L’inactivité militaire a progressivement fait de l’Amirauté une « bizarre entreprise rentable, qui s’enorgueillissait devant les bureaux de la capitale de ses bénéfices plus que de ses faits d’armes », plus occupée de fermage que de conquêtes ou de défense. « On pouvait enregistrer le progrès de son engourdissement inquiétant, dans le reflux de la vie aventureuse et dans le sourd appel montant de la terre rassurante et limitée. »
La rumeur barbare
Aldo s’étonne de trouver l’Amirauté dans un « état de stagnation », d’« irrémédiable décadence » : « L’aspect habituel du port était celui du profond sommeil », dit-il déçu. Pourtant, il demeure sceptique face à la montée de rumeurs et de « bruits » persistants qui laissent deviner que quelque chose se prépare du côté du Farghestan. Il refuse de les créditer du moindre fond de vérité – alors même qu’il aspire confusément à la nouveauté qui s’annonce, alors même qu’il a précisément quitté Orsenna dans l’espoir de rompre la monotonie de l’existence d’un fils de bonne famille. Lorsque l’administration d’Orsenna l’engage à prendre ces « bruits » plus au sérieux, il est surpris que son scepticisme qu’il croyait de commande ne soit pas partagé en haut lieu ; il franchira pourtant le pas qui précipitera le bouleversement.
Orsenna est l’image même de l’État stable, depuis si longtemps habitué qu’il en a perdu toute vigueur. « Le rassurant de l’équilibre, c’est que rien ne bouge. Le vrai de l’équilibre, c’est qu’il suffit d’un souffle pour faire tout bouger », ainsi que le fait dire Gracq à Marino, le commandant de l’Amirauté, très attaché au maintien de cet équilibre, satisfait de l’existence sans surprise qu’il entraîne et inquiet du moindre changement. Mais à la tête d’Orsenna, un nouveau maître a l’ambition de secouer les choses : « Il y a trop longtemps qu’Orsenna n’a été remise dans les hasards. Il y a trop longtemps qu’Orsenna n’a été remise dans le jeu. » Devant un Aldo effaré, Danielo, l’homme fort de la Seigneurie d’Orsenna, expose sa volonté de sauver Orsenna contre elle-même, contre son « assoupissement sans âge », quitte à l’engager sur un chemin de mort et de destruction. « Quand un État a connu de trop de siècles, dit Danielo, la peau épaissie devient un mur, une grande muraille : alors les temps sont venus, alors il est temps que les trompettes sonnent, que les murs s’écroulent, que les siècles se consomment et que les cavaliers entrent par la brèche, les beaux cavaliers qui sentent l’herbe sauvage et la nuit fraîche, avec leurs yeux d’ailleurs et leurs manteaux soulevés par le vent.
La sécurité contre la vie
La sécurité dans laquelle végète Orsenna, son assurance que rien ne changera, que les choses resteront toujours ce qu’elles sont, sont les signes de son déclin et de sa momification. Dans une société comme la nôtre où la sécurité est un argument électoral, il peut sembler surprenant que cette dernière soit comprise ici comme le signe de la mort ; c’est que nous confondons la conservation d’une vie individuelle, la bourgeoise « sécurité des biens et des personnes », avec la vie au sens fort. Mais « le monde n’est justifié qu’aux dépens éternels de sa sûreté » : quand on se mure contre les « hasards » et le « jeu », contre l’aiguillon de la vie, on conserve certes son corps et sa tranquillité d’esprit, mais c’est au même titre que les onguents conservent les cadavres. Or les cadavres n’ont aucun droit sur la vie, par définition. « Il y a plus urgent que la conservation d’une vie, si tant est qu’Orsenna vive encore. Il y a son salut. » Comme dans la parabole évangélique des talents, celui qui ne remet pas en jeu ce qu’il a reçu, celui qui ne risque rien, ne mérite rien. On ne peut faire fructifier quelque chose que l’on ne risque pas de perdre.
Au cœur du roman, le récit du lent éveil d’Orsenna face aux événements prend une dimension spirituelle lorsque Aldo assiste au sublime sermon d’une messe de Noël. C’est que Noël est la fête du « Roi qui apportait non la paix, mais l’épée », d’une lumière germant au cœur des ténèbres hivernales, de la naissance par excellence qui est le modèle de tout avènement : « Je vous apporte la nouvelle d’une ténébreuse naissance », clame le prêtre. Si le texte ne le dit pas explicitement, l’évocation de la Nativité vise bien les « invasions barbares » qui, du Farghestan, déferleront bientôt sur Orsenna, en ceci qu’elles ouvrent un nouveau cycle, une ère d’incertitude féconde : « En cette nuit d’attente et de tremblement, dit le prêtre, en cette nuit du monde la plus béante et la plus incertaine, je vous dénonce le Sommeil et je vous dénonce la Sécurité. »
La commémoration de la naissance du Christ est l’occasion de fustiger « la race de la porte close », « ceux qui tiennent que la terre a désormais son plein et sa suffisance », « les sentinelles de l’éternel Repos » prêtes à tout pour préserver le statu quo et sauvegarder ce qu’elles n’ont pas même acquis de leurs mains, mais dont elles n’ont fait qu’hériter. Or, comme l’écrit Ernst Jünger, ami de Gracq, dans Les Falaises de marbre, « l’héritage est la richesse des morts ». Et les morts s’opposent aux vivants, a fortiori aux naissances et à leur cortège de désagréments : « Il est des hommes pour qui c’est chose toujours mal venue que la naissance ; chose ruineuse et dérangeante, sang et cris, douleur et appauvrissement, un terrible remue-ménage – l’heure qu’on n’a point fixée, les projets qu’elle traverse, la fin du repos, les nuits blanches, toute une tornade de hasards autour d’une boîte minuscule. »
Et si la naissance doit apporter aussi la mort, si les têtes doivent fleurir au bout des piques, si l’ordre et la marche du monde doivent en être troublés, ainsi soit-il ! Car vient un moment où « tout vaut mieux que d’être ligoté vivant à un cadavre, tout soudain est préférable à se coller à cette chose condamnée qui sent la mort ». Outre que la naissance est « le Sens ». Quel sens ? Celui même de la vie.
[Vous pouvez vous procurer PHILITT #5 en cliquant sur ce lien.]
00:14 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : julien gracq, littérature, littérature française, france, lettres, lettres françaises | |
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Je connais peu de choses sur Jean Fontenoy. Je les ai découvertes il y a quarante ans dans l’excellent livre de Pierre-Marie Dioudonnat, Je suis partout. Les maurrassiens devant la tentation fasciste. Il était dépeint comme un intrépide combattant apte à mener un assaut sur skis. Sa légende lui prêtait une liaison dangereuse avec l’épouse de Tchang Kaï-Chek. D’aucuns pensent aujourd’hui qu’il n’existe qu’une seule biographie « non romancée » (Philippe Vilgier, Jean Fontenoy. Aventurier, journaliste et écrivain, Via Romana, 2012) de cet étonnant personnage qui, à son retour de Chine, fait connaissance de Madeleine Charnaux.
Celle-ci naît à Vichy en 1902 et y meurt en 1943, ce qui pourrait faire penser à une existence tranquille. C’est tout au contraire un parcours semé d’aventures qui caractérise cette femme dont la première passion est le sculpture. Elle est l’élève et le modèle d’Antoine Bourdelle. Elle obtient une première consécration artistique en 1931 à la faveur d’une exposition de ses œuvres au musée du Luxembourg.
Ensuite résonne en Madeleine Charnaux l’appel des grands espaces aériens. Première aviatrice à atterrir à Marrakech en 1932, elle participe à de nombreuses démonstrations et travaille à l’école d’acrobatie Morane-Saulnier. Elle réalise un raid inédit Paris – Tripoli et, d’un nouveau périple en Afrique du Nord, elle ramène des dessins et des sculptures dont l’exposition est bien accueillie par le public et la critique, mais dont le succès commercial est mitigé en 1934.
Également journaliste, Madeleine Charnaux propose au Petit Parisien un reportage sur Italo Balbo, promoteur de l’aviation italienne. Après avoir battu plusieurs records (notamment de vitesse en 1937), elle épouse en 1938 l’auteur de Shanghai Secret évoqué plus haut. Bien qu’affaiblie par un cancer, elle écrit ses souvenirs d’aviatrice (La Passion du ciel, 1942) et un roman policier qui sortira chez France-Empire après sa mort en 1944.
Récemment réédité, ce polar se passe tout naturellement dans le milieu de l’aviation et le préfacier Philippe Vilgier écrit : « Après avoir refermé le livre, comment ne pas songer que Maria Sturm est une cousine de Madeleine Charnaux qui aurait mal tourné ? » En effet, l’héroïne trouve la mort après avoir été impliquée dans un trafic de stupéfiants, au grand déplaisir du commissaire Félix, pour qui Marina était une « idole ailée ». Il aurait peut-être préféré que l’aviatrice ait été assassinée par son amant le colonel Terne qui, en raison de leur virulente altercation la veille du drame, fait longtemps figure de suspect numéro un.
Voici Terne sortant de prison, disculpé et attendu dans un taxi par son épouse qui lui pardonne son aventure extra-conjugale. « Terne avait appris ce matin de bonne heure qu’il était libre et pouvait rentrer chez lui. La levée d’écrou avait eu lieu. Grisonnant, le teint sali par l’insomnie, le colonel paraissait très vieux, marchant lentement, tête basse, le long du corridor froid et sombre. Le gardien lui avait rendu ses effet. C’est-à-dire son col, sa cravate et ses lacets de soulier. Il tenait à la main le sac de toilette en cuir dont les coins s’étaient usés dans les carlingues d’avions. Terne passa la grande voûte d’entrée et se trouva dans la rue la plus lugubre de Paris.
Il leva les yeux sur le café triste À la Bonne Santé qui fait face aux hautes murailles noires de la prison et s’approcha d’un taxi qui semblait l’attendre. Un visage fané, aux beaux yeux brillants de larmes, se tourna vers lui, encadré par la portière. Madame Terne lui enleva le petit sac des mains, le posa à côté d’elle et sans rien dire, tendrement, pitoyablement, serra dans ses bras son compagnon malheureux.
– Rentrons vite, les enfants nous attendent. Ils vont être si contents ! »
Douée pour le dessin, les arts plastiques, l’écriture narrative et journalistique, Madeleine Charnaux n’a pas eu le temps de développer les diverses facettes de sa personnalité. Emportée par la maladie à l’âge de quarante ans, elle laisse surtout le souvenir d’une grande figure de l’aviation française. « C’était une jeune femme d’un grand charme. Blonde aux yeux pervenche, amoureuse de Rimbaud, de Rilke et de Bach, elle était douée d’une volonté indomptable (Saint-Paulien). »
Forçant l’admiration de Mermoz et bénéficiant de l’estime de Jean Cocteau, elle a côtoyé dans la revue Lecture 1940 Paul Morand et Henri de Montherlant. Il faut remercier Francis Bergeron et Pierre Gillieth d’avoir accueilli Madeleine Charnaux dans leur collection.
Daniel Cologne
• Madeleine Charnaux, Qui a tué Marina Sturm ?, Éditions Auda Isarn, coll. « Le Lys noir », 2017, 184 p., 12 €.
00:29 Publié dans Littérature, Livre, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : madeleine charnaux, aviation, littérature, livre, littérature française, lettres, lettres françaises | |
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